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et largeur d’esprit, de manière à leur faire croire qu’au lieu de projets funestes à leur intégrité et à leur autonomie, vous voulez maintenir ces choses qui leur sont chères : après quelques générations, ils vous appartiendront ; le procédé de fusion entre les éléments anciens et nouveaux s’accomplira sans heurts, sans tiraillements, sans susciter de révoltes ni de regrets. Adoptez une autre ligne de conduite, et les choses en seront encore au point initial, après des générations. Et si c’est à la race française que l’on a affaire, il faut redoubler de tact et de prudence, étant donnée sa plus grande sensibilité.

La population qui se jetait dans les colonies conquises par l’Angleterre a presque toujours cherché à imposer, par ruse ou par force, sa langue et ses croyances ; et cette tendance subsiste encore plus ou moins de nos jours. L’on veut à tout prix composer un tout homogène, former une masse compacte, inspirer les mêmes idées, les mêmes sentiments, les mêmes goûts, — comme si pareille fin était essentielle au progrès et à la sécurité du pays[1]. L’on oublie que ce zèle intempestif est de nature à produire un résultat tout opposé à celui qu’on en attendait. À vouloir trop demander, l’on obtient moins.

La France, malgré toutes ses fautes, a tenu une politique différente et en a recueilli des fruits abondants. Sa Bretagne, après bien des siècles, parle encore le breton, mais elle n’en est pas moins française de cœur et d’âme. L’Alsace

  1. À ce propos, nous rappellerons la thèse impérialiste qui fut développée en plein Congrès Eucharistique de Montréal, le samedi, 15 septembre 1910, par Sa Grandeur Mgr  l’Évêque de Westminster, et la réponse vraiment inspirée qu’y fit M. Henri Bourassa.

    Cf. xxie Congrès Eucharistique International, Montréal, Tome 1er. Page 150. Discours de Mgr  Bourne. Page 160. Discours de M. Henri Bourassa.