Page:Riccoboni - Œuvres complètes, Tome 1, 1818.djvu/152

Cette page n’a pas encore été corrigée

indifférence, sa haine, ses mépris même ! Mais jamais, jamais sa mort. Abandonnée, avilie, déshonorée, privée de tout, sans amis, sans asile, j’expierai sa faute et la mienne. Dieu des vengeances, tu l’es aussi des miséricordes ! Ah ! ne frappe que moi. Daigne accorder sa vie à mes vœux, aux larmes amères que je répands devant toi ! je mourrai contente, si j’apprends en expirant que ton bras l’a sauvé, qu’il vit, et qu’il est heureux » ! Hélas, l’objet de tant de pleurs, d’un sentiment si tendre, si désintéressé, n’étoit déjà plus. Percé de trois coups mortels, renversé, foulé aux pieds des chevaux, souillé de sang et de poussière, Edouard, confondu dans un monceau de morts, n’avoit pas même été reconnu. On le crut prisonnier, ensuite perdu. Sir Humfroid, pris à côté de son maître expirant, qu’il s’efforçoit de relever, pouvoit seul donner des éclaircissemens sur son sort ; mais dangereusement blessé lui-même, il resta plusieurs jours sans être en état de parler ni d’écrire.

Ladi Sara envoya un exprès à milord Revell. Elle le croyoit informé du destin d’Edouard, et le supplioit de l’en instruire. Le Comte reçut en même temps son courrier et une lettre de sir Humfroid ; la confirmation de la mort d’Edouard le pénétra de douleur, et les expressions de Sara en augmentèrent l’amertume. Sa jeunesse, ses qualités aimables, sa tendresse, son malheur, intéressèrent vivement le cœur sensible de Milord. Elle avoit été si chère à Edouard ; il la regardoit en ce moment comme une partie précieuse de l’ami qu’il pleuroit ; et son ame généreuse et délicate crut pouvoir obliger encore