Page:Riccoboni - Œuvres complètes, Tome 1, 1818.djvu/151

Cette page n’a pas encore été corrigée

pour nous retirer encore ». Ladi Sara eut à peine fini de lire, qu’elle tomba, saisie de crainte, dans les bras de mistriss Larkin, en prononçant d’une voix basse : « ô Edouard, ô mon cher Edouard » ! On la ranima avec de l’eau et des sels ; mais effrayée, tremblante, hors d’elle-même, le serrement de son cœur ne lui permettoit de s’exprimer que par des exclamations. Levant tristement vers le ciel ses yeux remplis de larmes : « Grand Dieu ! Dieu tout-puissant, s’écrioit-elle, est-il temps ? Est-il encore temps de t’implorer » ?

Elle attendit le lendemain avec une impatience, une agitation, qui ne lui laissèrent pas donner un instant au repos. Aucun courrier n’arriva. On l’assuroit en vain qu’ils ne pouvoient passer. Ce silence funeste lui parut celui de la mort. « Il n’est plus, disoit-elle à Lidy ; non, il n’est plus ; je l’ai perdu pour jamais ».

Plusieurs jours se passèrent dans cette horrible incertitude. Chaque mouvement qui se faisoit autour de la malheureuse Sara, lui causoit une révolution si grande, qu’à peine osoit-on troubler la solitude où elle vouloit demeurer. Elle ne sentoit plus son existence que par les agitations douloureuses qu’excitoit en elle l’attente d’une confirmation désespérante. Seule dans son cabinet, prosternée devant l’Etre suprême, les mains élevées vers lui, ses cris, ses gémissemens, lui demandoient la vie d’Edouard. « Qu’il vive, c’est assez, répétoit-elle avec ardeur ; qu’il vive ; et que je le perde ! que ses jours conservés ne soient plus pour moi ! que je pleure son éloignement, son