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supplie le ciel d’étendre cette exhérédation jusque sur son partage céleste ».

Le comte de Revell ignoroit encore la fuite de ladi Sara, et fut extrêmement surpris de l’apprendre par cette voie. Il envoya un gentilhomme au château d’Alderson pour assurer Milord que, depuis le jour où ils s’étoient séparés, il n’avoit entretenu aucun commerce avec ladi Sara, et ne participoit en rien au chagrin qu’elle venoit de lui causer. Milord refusa de voir personne de la part du Comte ; il répandit dans sa maison, que ladi Albury menoit Sara en France sans sa permission ; il se plaignit hautement de cette dame, dont il supposa une lettre ; il dit ensuite, en paroissant s’appaiser, que si ce voyage rétablissoit parfaitement sa fille, comme sa parente l’espéroit, il leur pardonneroit aisément à toutes deux de l’avoir entrepris malgré sa volonté. Peu de jours après, il fit courir le bruit que ladi Sara se trouvoit dangereusement malade à Calais. Il partit en poste avec un seul valet-de-chambre, pour aller à son secours ; il resta un mois absent : ce temps passé, il retourna à Alderson, affectant une douleur extrême de la mort de sa fille, dont le cercueil le suivoit. Il lui fit des obsèques magnifiques, mit toute sa maison et lui-même dans un deuil profond. Ladi Sara fut tendrement pleurée ; on la regretta long-temps. Milord Revell vit avec indifférence une feinte qu’il trouva basse et ridicule. Il ne s’empressa point à détruire l’erreur de la province ; c’étoit un soin qu’il réservoit à Edouard. Ladi Albury, prévenue par milord Alderson, garda le secret ; ainsi personne ne douta de la mort de ladi Sara.