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être, me font paroître ingrat. Ah ! je ne le suis point, jamais je ne le serai. Mais en perdant l’espoir de vivre pour ladi Sara, d’obtenir la main de ladi Sara, j’ai perdu celui de chérir d’autres biens. Qu’est-ce que la grandeur, les richesses, de vaines dignités ? L’avide ambition les poursuit, l’orgueil en jouit, et le cœur s’en dégoûte. L’empire de l’univers vaut-il une des douceurs que je regrette » !

« Mais, reprit le Comte, auriez-vous accepté la main de ladi Sara au prix infâme que l’on y mettoit ? Auriez-vous foulé aux pieds la cendre de votre père, méprisé tous vos aïeux ? Auriez-vous renoncé à secourir votre patrie ? — Je ne sais, dit Edouard, mais je ne puis vivre sans Sara. J’estime si sincèrement ladi Sara, continua milord Revell, que j’ai travaillé à vous la rendre. Mes soins n’ont point réussi : j’ai employé un ami auprès de son père, sans paroître prendre part à sa négociation : milord Carlington a proposé des accommodemens ; je me serois prêté beaucoup pour vous tirer du danger où je vous voyois, et vous donner une femme digne de vous : mais, ni votre état vivement représenté, ni le péril où étoit sa fille, ni l’offre de faire porter son nom au premier fils qui naîtroit de votre union avec Sara, rien n’a pu ramener cet esprit altier. On se soumettroit en vain aux conditions qu’il exigeoit auparavant ; jamais, de son consentement, sa fille ne sera à vous ».

« Elle ne sera jamais à moi ! dit Edouard ; et si elle renonçoit à tout pour se donner à l’amant qu’elle aime ; si elle sacrifioit à mon amour les biens qui doivent être son partage ; si son cœur aussi tendre,