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reux hier, si dignes d’être respectés, d’être plaints ; aujourd’hui coupables, avilis à nos propres yeux, n’avons-nous pas mérité notre infortune ? Plus d’union entre nous ; je connois trop mon père pour espérer. S’il se croit offensé, il a rompu sans retour… Ah ! comment supporter cette idée, jointe au souvenir… malheureuse témérité ! fatale imprudence ! Mais que servent de vains regrets. Adieu, je vous aime, je vous aimerai toute ma vie. Souvenez-vous de vos promesses, et vivez pour les remplir ».

Ladi Sara passa le reste de la nuit à relire les lettres d’Edouard, à pleurer, à gémir. Le matin, elle se trouva très-mal ; des foiblesses continuelles faisoient craindre à tous momens qu’elle n’expirât, On envoya promptement avertir Milord du danger de sa fille. Il revint et la vit attaquée d’une fièvre brûlante, dont tous les symptômes étoient effrayans. Ses larmes, ses longs soupirs marquoient l’oppression de son cœur, laissoient assez connoître d’où naissoit sa maladie. Mais son état, loin d’attendrir Milord, l’irrita contre elle ; il ne put lui pardonner de sentir une douleur si vive de la perte d’Edouard. Il lui montra un visage sévère, ne lui parla que pour lui reprocher sa foiblesse ; et sans employer la douceur et la complaisance à ramener le calme dans son esprit, à la consoler des peines qu’il lui causoit lui-même, il se contenta de lui procurer les secours d’un art, dont l’ame ne reçoit jamais de soulagement.

La dureté de cette conduite aigrit les chagrins de ladi Sara. Elle vit trop qu’elle ne devoit rien attendre