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pris ; il songea à le soutenir, même à l’augmenter ; une grande naissance, une figure charmante, mille talens, une humeur complaisante, l’air doux, le cœur faux, beaucoup de finesse dans l’esprit, l’art de cacher ses vices, et de connoître le foible d’autrui, fondoient ses espérances : elles ne furent point déçues. Un tel caractère réussit presque toujours. L’apparence des vertus est bien plus séduisante que les vertus mêmes ; et celui qui feint de les avoir, a bien de l’avantage sur celui qui les possède.

Le marquis de Cressy devint en peu de temps l’admiration des deux sexes. Les hommes recherchèrent son amitié, et les femmes désirèrent sa tendresse ; mais celles qui tentèrent de l’engager, trouvèrent dans son cœur une barrière difficile à forcer. De toutes les passions, l’intérêt est celle qui cède le moins aux attaques du plaisir.

Le Marquis résista long-temps aux douceurs qui lui étoient offertes, même à sa vanité. Le titre envié d’homme à bonne fortune, le toucha bien moins que l’espoir d’une alliance, qu’une conduite sage pouvoit lui procurer. Sans pénétrer ses desseins, on vit son indifférence, et le peu de succès ayant rebuté les femmes qui ne vouloient que plaire, la difficulté anima celles dont l’ame tendre, les désirs timides et réglés par la décence, sembloient dignes de vaincre la résistance d’un homme si capable, en apparence, de rendre heureuse celle qui parviendroit à toucher son cœur.

Madame la comtesse de Raisel et mademoiselle du Bugei, furent de ces dernières. La Comtesse, veuve depuis deux ans d’un mari qu’elle n’aimoit pas, dont