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ceux qui sans permission du Roy negotient ou conversent avec les estrangers. Et s’il est quelquefois necessaire d’envoyer avec mandement ou commission quel qu’un hors du Royaume, il n’y a quasi personne qui s’y puisse resoudre, & toute la famille deplore celui qui despart, comme s’il estoit traisné à la mort  : & quand il retourne, le Magistrat pour recompense de sa legation, lui donne quelque dignité ou charge honorable.

Personne ne porte les armes dans les villes, non pas mesme les soldatz ou chefz & capitaines de guerre ; ny aussi les gens de lettres, si ce n’est quand ilz vont à leurs monstres, exercices ou batailles, toutefois quelques-uns accompagnent les plus nobles Mandarins avec des armes. Ni aussi personne n’a des armes en sa maison, si ce n’est quelque poignard de fer, duquel ilz se servent quelquefois par les chemins contre les voleurs ; pource n’y a il aucunes factions, ou querelles parmy eux, si ce n’est celles qui se vuident par l’impression des ongles, ou arrachement des cheveux. Il n’y a pas de desir de se venger des injures par les blessures, ou par la mort ; mais celuy qui fuit & s’abstient de faire tort, celuy-là est estime & loué pour homme prudent & fort.

Le Roy estant mort (de peur qu’il n’y arrivé des factions) il n’est pas permis à aucun autre filz, ou parent du Roy, si ce n’est à l’heritier du Royaume, de demeurer dans la ville Royale ; voire mesme c’est crime de leze Majeste à ceux qui sont espars en diverses villes de mestre le pied dehors. Les querelles esmeues parmi eux, sont vuidees par l’un des plus nobles d’entre eux ; par lequel ilz sont gouvernez. Mais s’ilz ont affaire avec quelque autre qui ne soit pas parent du Roy, ilz sont subjectz aux Sieges, & punitions des Magistratz publicz, comme le moindre du peuple.





De quelques coustumes des Chinois


CHAPITRE VII


LE Royaume de la Chine s’est donné un surnom ancien de la Civilité, & mœurs plus courtoises ; voire-mesme la civilité est tenue pour l’une des cinq vertus cardinales, qui parmy eux sont estimées servir de soustien aux autres, desquelles ilz recommandent amplement les devoirs en leurs livres. Ilz disent que le devoir de cete vertu consiste en la veneration mutuelle, & prudente consideration au