Page:Ricci - Trigault -Histoire de l'expédition chrestienne au royaume de la Chine, Rache, 1617.djvu/39

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Or il n'y a aucune escole, ou Académie publique (ce que quelques uns de noz escrivains ont asseuré) desquelles les maistres ayent entrepris d'interpreter ces livres. Mais chacun faict eslection d'un precepteur à sa volonté, par lequel il soit à ses propres despens instruict en sa maison. Il y a grand nombre de ces maistres domestiques, tant à cause de la difficulté des characteres Chinois, esquelz à grande peine plusieurs peuvent estre instruictz par un seul, que pource que c'est la coustume (comme j’ay dit) que chacun en sa propre maison tient escole ouverte pour l’instruction de ses enfans, encor qu’il n'y en ait qu’un ou deux ; & ce comme je croy, à fin qu’ilz ne soient destournez de leurs estudes par la fréquentation des autres.

En cete science on donne trois degrez de lettres à ceux de ce nombre qui se presentent pour estre examinez, & qui en sont jugez capables ; Et c'est examen consiste presque en la seule escriture. Le premier degré des gens de lettres se donne en chasque ville au lieu qu’ilz appellent Escole. Quelque homme fort docte, denommé du Roy mesme à cet effect, en faict la collation. Icelui du nom de son office est appelle Tihio, & le degré Scieucai, & ressemble à nostre Baccalauréat. Le Tihio donc marche par toutes les villes de la province, pour apres avoir premis trois examens donner ce degré. Si tost que ce Chancelier (à fin que je parle selon nostre coustume) est arrivé, tous ceux de la ville ou des lieux voisins qui prétendent à ce degré, accourent incontinent ensemble, & se sousmettent à l'examen. Le premier se fait par ces maistres d'escole, qui ayans obtenu ce degré president aux autres Bacheliers, attendant qu’ilz en acquièrent un autre plus haut. Chacun est receu à cet examen, & arrivé souvent qu’il y en a quatre ou cinq mille d'une seule ville. Ces maistres d'escole sont pour ce sujet gagez du Roy. Ceux-cy en après sont par iceux renvoyez aux quatre Prevostz de la ville, qui sont tous gens de lettres (car aucun autre ne parvient au gouvernement de la République) lesquelz presentent encor ceux qui ont esté examinez au Chancelier : mais deux cens seulement de tout ce nombre qu’ilz ont jugez les plus capables par la meilleure escriture. Le troisiesme examen est faict par le Chancelier, qui est en tout & partout plus rigoureux que les autres, car de deux cens il n'en dénomme pas plus de vingt ou trente Bacheliers (selon la grandeur du pays) lesquelz par ce mesme examen il aura trouve les plus dignes, & les adjouste au nombre des Bacheliers des années précédentes, qui tous à cause de leur dignité ne sont pas des moindres de la ville. Car ilz sont honorez de tous pour le respect de l'autorité à laquelle ilz s'avancent ; ilz prennent la robbe longue, le bonnet, &