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sont de droit hereditaire destinez à cela. Craignant que de cete cognoissance des astres, celui qui l'auroit acquise, ne prist occasion, & pouvoir de tramer des nouveautez au Royaume. Celui toutefois qui regne aujourd'huy entretient avec grande despense plusieurs Mathematiciens, & iceux sont ou Eunuques dans l'enclos du Palais, ou au dehors, des officiers Royaux, desquelz il y a auiourd'huy deux sieges en la Cour Royale de Pequin  : l'un de Chinois, qui font profession de renger les Kalendriers & Ecclipses selon la manière qu’ilz ont apprise de leurs ancestres. L'autre de Sarazins qui supputent le mesme selon la discipline apportée d'Occident. Et en apres se communiquent l'opinion des deux Presidiaux, s'aidant l'un l'autre. Tous les deux aussi ont une place sur une petite colline pour contempler les astres, en laquelle ilz ont eslevé des machines de fonte de grandeur extraordinaire, qui ont quelque ressemblance d'antiquité. En ceste colline il y a tousjours un de leurs collègues qui fait la sentinelle de nuict, pour voir si d'aventure le ciel par quelque nouveauté extraordinaire des astres, ou des planettes presage quelque chose ; ce qu’estant arrivé, le lendemain envoyant un livret au Roy, ilz luy en donnent advis ; & ensemble declarent ce qu’il leur semble que cela presage de bon ou de mauvais. La place des Mathematiciens de Nanquin paroist sur une colline eslevée dans la ville, & la grandeur des instrumens de Mathematique passe l'elegance de ceux de Pequin, pour ce qu’en ce temps-là les Roys residoyent en cete ville.

Le devoir des Astrologues de Pequin est de predire par tout le Royaume les défauts du Soleil & de la Lune, & l'ordonnance estant publiée, les Magistrats & ministres des Idoles sont commandez de s'assembler en certain lieu, estans revestus des ornemens de leurs offices, & secourir la planete malade. Ce qu’ilz pensent faire avec des cymbales de cuyvre touchées à cadence, & flechissans souvent les genoux pendant tout le temps que ces planetes defaillants sont malades. J'entends qu’ilz craingnent pendant ce temps d'estre devorez de je ne scay quel serpent.

Les preceptes de la médecine ne font pas peu differens des nostres ; mais ilz ne tastent pas autrement le pouls ou battement de veines que les nostres. Et certes ilz sont assez heureux en la Medecine. Ilz usent de medicamens, simples, herbes, racines, & autres semblables. Parquoy toute la médecine Chinoise est comprise aux préceptes de nostre Botanique. Il n'y a aucun College public de cest art, mais chacun est particulièrement enseigné par quelque maistre qui luy plaist. En l'une & l'autre Cour apres l'examen on accorde à l'art de Medecine des degrez, mais ainsi comme en passant, & sans aucun esgard ; de sorte