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& estant allumée, elle rend plus de clairté. Elle se fait de certains vermisseaux, que pour cet effect ils nourrissent dans des arbres. Ilz en font aussi d’autre du fruict de certain arbre, qui n’est pas moins blanche que la susdicte, mais toutefois en clairté beaucoup inferieur.

D’autant que le papier est en plus grand usage entre les Chinois qu’entre nous, pour cela on le fait de diverses façons, mais toutefois chasque espece est beaucoup moindre que le nostre. Car il n’y a aucun papier en la Chine qui puisse souffrir l’impression ou l’escriture des deux costez. Parquoy une feuille du nostre en vaut deux de la Chine. Il se deschire aussi aisement, & ne dure pas long temps.

Ilz font certaines fueilles carrées, qu’ilz allongent un ou deux pieds de longueur, ou largeur ; mais certes celui qui se fait de coton, est plus blanc que le nostre.

Je laisse necessairement beaucoup de choses, des marbres divers en couleur, des rubis & autres cailloux, & pierres precieuses, des couleurs assez propres à peindre, des bois odorants & betumes, & six cens autres  : mais toutefois je ne puis mettre en arriere trois ou quatre choses aux nostres incognues. La première est cet arbrisseau des fueilles duquel se fait ceste decoction fameuse des Chinois, Japons & peuples voisins, qu’ilz appellent Cian. L’usage d’icelle ne peut pas estre du tout ancien entre les Chinois, car on ne trouve en leurs vieux volumes aucun charactere hiéroglyphique pour la denoter (telz que sont quasi toutes les lettres Chinoises) d’où on pourroit aussi peut estre estimer que noz forestz ne manquent pas aussi de ceste fueille. Ilz cueillent ces fueilles au Printemps, les seichent à l’ombre, & les gardent pour leur decoction ordinaire, dont ilz se servent presque tousjours au boire, non seulement a table, mais toutes les fois qu’un hoste entre pour visiter son amy. Car en devisant il est convié avec cette potion, & encor pour la deuxieme, et troisiesme fois, s’il retarde tant soit peu. On la boit ou plustost on la hume tousjours chaude, & par son amertume tempérée, elle n’est pas desagreable à la bouche, & à la vérité saine, & sert à plusieurs choses, n’estant sa bonté utile à une seule, ains une commodité surpasse l’autre en plusieurs & diverses occasions  : & ainsi la livre se vend un sou, & souvent deux & trois, si elle est estimée de la meilleure. La plus excellente au Japon est vendue dix, & souvent douze escus d’or, ou l’on en use un peu autrement qu’en la Chine  : car les Japonois mestent ces fueilles pulverisees en un gobelet plein d’eau chaude, à la quantité de deux ou trois cueillerées, & boivent ceste potion ainsi meslée  : mais les Chinois jettent quelque quantité de ces fueilles en un petit vaisseau d’eau bouillante, & en apres quand elle a attiré la vertu & faculté