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ŒUVRES DIVERSES.

prohibant l’exportation des monnaies métalliques ; mais une légère réflexion nous convaicera que c’est notre choix et non la nécessité qui nous tait l’envoyer au dehors. Il est en effet hautement avantageux pour nous d’échanger une marchandise superflue pour des objets qu’on peut rendre productifs.

On peut en tout temps confier sans danger l’exportation du numéraire au libre arbitre des particuliers. Jamais cette exportation ne dépassera celle des autres marchandises, si elle n’est pas profitable à la nation. Et si réellement cet avantage existe, il n’est pas de loi capable de prévenir l’exportation. Heureusement que dans ce cas, comme dans la plupart de ceux où le commerce est ouvert à la libre concurrence, les intérêts individuels et ceux de la communauté sont constamment en harmonie.

S’il était possible d’exécuter strictement la loi dirigée contre la fusion et l’exportation du numéraire, à un moment où d’autres règlements permettraient d’exporter les lingots d’or, il n’en résulterait aucun bénéfice. Loin de là, on imposerait un dommage notable à ceux qui pourraient se trouver obligés de payer deux onces et plus d’or monnaie pour une once d’or métal. Il y aurait là une dépréciation réelle de notre système monétaire, qui élèverait les prix de toutes les autres commodités dans un rapport direct avec l’accroissement de la valeur des lingots d’or. Le détenteur de numéraire aurait alors à supporter une perte égale à celle qui pèserait sur le propriétaire de blé, si on promulguait une loi qui lui défendit de vendre son blé à plus de la moitié de sa valeur sur le marché. La loi contre l’exportation du numéraire (coin) a réellement cette tendance. Mais il est si facile de l’éluder que l’or-lingot a constamment eu une valeur à peu près égale à celle de l’or-monnaie.

Il ressort donc de tous ces faits qu’en supposant partout des quantités égales de métaux précieux, la circulation d’un pays ne peut jamais avoir pendant longtemps une valeur très-supérieure à celle d’une autre nation ; que, de plus, ces mots excès de circulation, ne sont que des termes relatifs ; qu’enfin, la circulation de l’Angleterre étant de dix millions, celle de France de cinq millions, celle de Hollande de quatre millions, etc., etc., si ces diverses circulations conservaient leurs proportions relatives tout en doublant ou triplant d’une manière absolue, aucun des pays ne se ressentirait d’une exubérance de monnaie.

Le prix des marchandises s’élèverait partout sous l’influence de cette circulation multipliée, mais nulle part on n’exporterait du nu-