Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/443

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

D’abord, que j’ai déjà fait voir que le revenu nominal ne sera pas réduit dans la proportion que M. Malthus cherche à établir ; il ne s’ensuivrait pas de ce que le blé aurait baissé de 50 pour cent, que la valeur du devenu de chaque particulier se trouvât réduite de 50 pour cent[1].

En second lieu, je crois que le lecteur conviendra avec moi que ce fardeau, en admettant qu’il existe, ne pèserait pas exclusivement sur « les propriétaires et les classes industrieuses de la société. » Le créancier de l’État, dans la dépense qu’il fait, paie sa part, pour subvenir aux dépenses de l’État, de la même manière que les autres classes de la société. Dans le cas donc où l’argent augmenterait de valeur réelle, quoiqu’il reçoive une valeur plus forte, il en paiera également une plus grande en impôts. Il ne peut donc être vrai de dire que toute l’addition à la valeur réelle de l’intérêt, doit être payée par les propriétaires et par les classes industrieuses.

Mais tout l’argument de M. Malthus repose sur une base peu solide. Il suppose que, parce que le revenu brut du pays est diminué, il faut, par conséquent, que le revenu net le soit également, et dans la même proportion. Un des objets que j’ai eus envie dans cet ouvrage a été de montrer que, par suite de toute baisse dans la valeur des choses de première nécessité, les salaires du travail doivent baisser, et les profits du capital s’élever, ou, en d’autres mots, que, sur une valeur annuelle déterminée, une moindre portion serait donnée en paiement à la classe ouvrière, et une plus considérable reviendrait à ceux dont les capitaux ont servi à payer le travail de cette classe. Supposons que la valeur des produits d’un genre particulier d’industrie soit de 1000 l. st., et qu’elle soit partagée entre le maître et ses ouvriers ; de telle sorte que 800 l. appartiennent aux ouvriers, et 200 livres au maître ; si la valeur de ces produits tombait à 900 livres, et qu’on épargnât 100 l. sur les salaires des ouvriers par suite de la baisse des objets de première nécessité, le retenu net du fabricant n’en souffrirait nullement, et par conséquent il pourrait aussi aisément payer le même montant d’impôts après cette réduction de prix[2].

  1. M. Malthus, dans un autre endroit de son ouvrage, suppose que les denrées varient de 25 ou de 20 pour cent, pendant que le blé varié de 33 1/3 pour cent. (Note de l’Auteur.)
  2. Dans le chapitre xxvi, j’ai observé que les ressources réelles d’un pays et ses