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Il n’y a pas grand inconvénient à établir un droit modéré de monnayage, surtout sur la monnaie destinée au paiement des petites sommes. Les pièces frappées acquièrent en général un surcroît de valeur égal au montant du droit, et cet impôt est par conséquent un de ceux qui n’affectent nullement ceux qui le paient, tant que la quantité de monnaie en circulation n’est pas excessive. Il faut cependant remarquer que, dans un pays où il y a un papier-monnaie en circulation, quoique ceux qui l’émettent soient tenus de le rembourser en espèces, si le porteur l’exige, il peut cependant arriver que ces billets, ainsi que les espèces, soient dépréciés de tout le montant du droit de monnayage établi sur le métal reconnu comme le seul moyen légal de paiement, et cela, avant que les règlements tendant à limiter la circulation du papier aient pu opérer. Si le droit de monnayage sur les pièces d’or était, par exemple, de 5 pour 100, la monnaie courante pourrait, par une forte émission de billets de banque, se trouver réellement dépréciée de 5 pour 100 avant que les porteurs de ces billets eussent trouvé de l’intérêt à les échanger contre des espèces pour les fondre en lingots.

Nous ne serions jamais exposés à éprouver une pareille dépréciation, s’il n’existait point de droit de monnayage ; ou si, malgré l’existence du droit, les porteurs de billets de banque pouvaient en demander le remboursement en lingots, à 3 l. 17 sh. 10 ½ d., prix de la monnaie, et non en espèces monnayées. À moins donc que la banque ne soit tenue de rembourser ses billets en lingots ou en espèces monnayées au gré du porteur, la loi récente qui a établi en Angleterre un droit de monnayage de 6 pour 100, ou de quatre pence par once d’argent, mais en ordonnant que l’or sera frappé par la monnaie sans frais, est peut-être la mesure la plus sage, et la plus efficace pour empêcher toute variation inutile dans les monnaies[1].

  1. M. Say serait d’avis que l’Hôtel des Monnaies se fit payer un droit de monnayage qui varierait selon la quantité de lingots qu’il aurait à frapper.

    « Le gouvernement ne frapperait les lingots des particuliers qu’autant qu’on lui paierait les frais et même le bénéfice de la fabrication. Ce bénéfice pourrait être porté assez haut en vertu du privilège exclusif de fabriquer ; mais il devrait varier suivant les circonstances où se trouveraient les Hôtels des Monnaies et les besoins de la circulation. » — J.-B. Say, liv. I, chap. 21. Une telle disposition aurait un effet très-dangereux, et exposerait le pays à une variation considérable et inutile dans la valeur intrinsèque des monnaies. (Note de l’Auteur.)

    Je n’ai rien à dire au sujet du danger que M. Ricardo trouve à ma proposition,