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prêter indéfiniment ; si elle prend plus que ce taux, il n’y aura que des dissipateurs et des prodigues qui consentent à lui emprunter. C’est pourquoi nous voyons que toutes les fois que le taux courant de l’intérêt excède 5 pour cent, qui est le taux auquel la Banque prête toujours, son bureau d’escompte est encombré de gens qui demandent de l’argent, et au contraire, quand le taux courant est, même pour peu de temps, au-dessous de 5 pour cent les commis de ce bureau n’ont rien à faire.

Ce qui a donc fait dire que la banque d’Angleterre avait, pendant les derniers vingt ans, donné de grands secours au commerce, en prêtant de l’argent aux commerçants, c’est que pendant toute cette époque, elle a prêté de l’argent au-dessous du taux courant de l’intérêt sur la place, c’est-à-dire au-dessous du taux auquel les commerçants pouvaient emprunter ailleurs ; mais, quant à moi, j’avoue que cela me semble plutôt une objection contre cet établissement, qu’un argument en sa faveur.

Que dirait-on d’un établissement qui approvisionnerait régulièrement la moitié des fabricants de drap, de laine, au-dessous du prix courant du marché ? Quel bien cela ferait-il à la communauté ? Cela ne donnerait pas plus d’étendue à notre commerce ; car la laine aurait été achetée également si on l’avait vendue au prix courant du marché. Cela ne ferait pas baisser le prix du drap pour le consommateur, parce que le prix, comme je l’ai déjà dit, se règle d’après ce que la production du drap coûte aux fabricants les moins favorisés. L’unique effet que cela produirait serait donc de grossir les profits d’une partie des fabricants de drap au delà du taux général et ordinaire des profits des autres. L’établissement supposé se priverait d’une partie de ses justes profits pour en faire jouir une autre partie de la communauté. Tel est précisément l’effet de nos établissements de banque. La loi fixe un taux d’intérêt au-dessous de celui auquel on le trouve à emprunter sur la place, et c’est au taux légal qu’on exige que la banque prête, en lui interdisant de prêter à un autre. Par la nature de son établissement, la banque possède des fonds considérables qu’elle ne peut placer que de cette manière ; et il en résulte qu’une partie des commerçants du royaume en tire un avantage indu, et qui est tout à fait perdu pour la nation, en obtenant ainsi un instrument du commerce à un taux plus bas que les personnes qui sont forcées d’être sous l’influence du prix courant de la place.

La somme totale des affaires de commerce que la communauté peut faire, dépend de la quantité de son capital, c’est-à-dire des matières