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Il est même évident, qu’animés par des principes arbitraires, ils n’y ont obéi qu’avec une extrême prudence. — Les termes actuels

    bon sens, dégagea les directeurs de la banque de toute crainte relativement à l’intervention du Parlement, et les encouragea à accroître le nombre de leurs billets en circulation. Les émissions des banques provinciales s’augmentèrent encore plus rapidement que celles de la banque d’Angleterre. La facilité d’être admis à l’escompte fut telle, que des individus qui pouvaient à peine payer le timbre de leurs billets réussirent très-fréquemment à obtenir de vastes capitaux ; et comme ils ne risquaient rien personnellement,’ils se livrèrent audacieusement aux spéculations les plus hasardées. M. Wakefield, dont la position lui offrit tant d’occasions de recueillir des renseignements exacts, informa le comité d’agriculture, en 1821, que « jusqu’à l’année 1813, il existait des banques sur presque tous les points du territoire, qui forçaient l’entrée de leur papier dans la circulation au prix d’énormes dépenses pour elles-mêmes, et, en beaucoup de cas, aux prix de leur ruine. » Et parmi les diverses réponses qui furent adressées aux enquêtes du conseil d’agriculture en 1816 par les citoyens les plus intelligents des différents districts du pays, il en est à peine une dans laquelle l’émission exagérée des billets de banque ne soit pas particulièrement désignée comme l’une des causes prédominantes de la hausse, sans antécédent encore, qui avait atteint les rentes et les prix.

    « Le prix du blé s’était élevé à un chiffre extraordinaire pendant les cinq années qui finirent en 1813. Mais partie en raison de la brillante récolte de cette année, partie, et principalement peut-être par suite de l’ouverture des ports hollandais et du renouvellement des relations avec le continent, les prix fléchirent considérablement vers la fin de l’année 1813 et le commencement de 1814. Et cette baisse ayant produit un manque de confiance, et répandu l’alarmé parmi les banques de province et leurs clients, détermina une destruction de papier de province qui n’a pu être égalée que par celle de 1825. En 1814, 1815 et 1816, on ne vit pas moins de 240 banques suspendre leurs paiements ; 89 accusations de banqueroute furent lancées contre ces établissements, et cela dans le rapport d’une accusation contre 10 1/2 banques de province existant en 1813. Les faillites qui s’ouvrirent alors furent les plus désastreuses, car elles atteignaient principalement les classes ouvrières, et dévoraient ainsi en un moment les fruits d’une longue vie de travail et d’économie. Des milliers d’individus, qui avaient en 1812 rêvé l’aisance, se trouvèrent dépourvus de toute véritable propriété, et plongés, comme par enchantement, sans qu’il y eût faute de leur part, dans l’abîme de la pauvreté.

    « La destruction du papier des banques de province en 1814,1815 et 1816, en réduisant la masse totale mise en circulation, éleva sa valeur, en 1816, à une presque égalité avec l’or. Et cette hausse ayant matériellement facilité un retour aux paiements en espèces, on commença à être généralement convaincu de l’opportunité qu’il y aurait à rapporter le décret sur les paiements en argent de la banque d’Angleterre. Ceci fut effectué en 1819 par l’acte 59 de Georges III, chap. 78, communément appelé bill de Peel, parce qu’il avait été proposé et obtenu à la Chambre des communes par sir Robert Peel.