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une trop grande quantité de papier, dont l’excédant lui revenait continuellement à l’échange, a été obligée, pendant plusieurs années de suite, de faire battre de la monnaie d’or jusqu’à concurrence de 500,000 livres st. et de 1,000,000 dans une seule année, ou, par évaluation moyenne, jusqu’à environ 850,000 liv. st. Pour fournir cette immense fabrication, la banque, à cause de l’état usé et dégradé où la monnaie d’or était depuis quelques années, se vit souvent obligée d’acheter jusqu’au prix de 4 liv. st. l’once l’or en lingots, qu’elle émettait bientôt après sur le prix de 3 liv. st. 17 sh. 10 ½ deniers l’once, ce qui lui faisait une perte de 2 ½ à 3 pour cent sur la fabrication d’une somme aussi énorme. Ainsi, quoique la banque n’eût point de droit de seigneuriage à payer, et quoique, à proprement parler, la dépense de fabrication fût aux frais du gouvernement, cette libéralité du gouvernement ne couvrit pas toute la dépense supportée par la banque. »

D’après le principe énoncé plus haut, il me semble très-évident qu’en retirant de la circulation le papier qui rentrait ainsi à la banque, la valeur de toute la monnaie, y compris celle des anciennes espèces monnayées et usées et celle des nouvelles, aurait monté, et, dans ce cas, toutes les demandes sur la banque auraient cessé d’être.

M. Buchanan n’est pourtant pas de cette opinion ; car il dit que la grande dépense que la banque a eu à supporter à cette époque fut occasionnée, non comme le docteur Smith paraît le supposer, par une émission excessive de papier, mais par l’état dégradé de la monnaie métallique, et par le haut prix du lingot qui en était la conséquence. On doit faire attention que la banque, n’ayant d’autre moyen de se procurer des guinées[1] que d’envoyer des lingots à la

  1. « Dans les marchés que le gouvernement conclut avec les particuliers, et dans ceux que les particuliers concluent entre eux, une pièce de monnaie n’est reçue, quelque dénomination qu’on lui donne, que pour sa valeur intrinsèque, accrue de la valeur que l’utilité de son empreinte y ajoute. » — J.-B. Say, liv. I, chap. 21, § 4.

    « La monnaie d’argent est si peu un signe, que les pièces de monnaie perdent de leur valeur en s’usant par le frottement ou par la friponnerie des rogneurs d’espèces ; toutes les marchandises augmentent nominalement de prix en proportion de l’altération éprouvée par elles ; et si le gouvernement fait une refonte équitable et rétablit dans chaque pièce la quantité de métal fin qui s’y trouvait dans l’origine, les marchandises reprennent le prix qu’elles avaient alors, sauf les variations qui ont pu avoir lieu dans la valeur de ces marchandises, par des circonstances qui leur sont particulières. ». — J.-B. Say, liv. I, chap. 21, § 6. (Note de l’Auteur.)