Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/370

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pays qu’ils exportent à l’étranger, plus cher qu’ils ne les eussent vendues sans cela. Il faut, à la fois, que leur propre pays vende plus cher qu’il n’aurait fait sans cela ; qu’il achète moins et vende moins ; qu’il jouisse moins et qu’il produise moins.

..... « On entend souvent nos marchands se plaindre des hauts salaires de nos ouvriers, comme étant la cause de ce que les ouvrages de leurs fabriques ne peuvent soutenir la concurrence dans les marchés étrangers ; mais on ne les entend jamais parler des hauts profits du capital. Ils se plaignent des gains excessifs des autres, mais ils ne disent rien du leur. Cependant les hauts profits du capital, en Angleterre, peuvent contribuer, dans beaucoup de circonstances, autant que les hauts salaires qu’on y paie aux ouvriers, et, dans quelques circonstances, contribuent peut-être davantage à faire hausser le prix des ouvrages des fabriques anglaises. »

J’admets que le monopole du commerce avec les colonies doit déranger, et quelquefois d’une manière désavantageuse, la direction des capitaux ; mais d’après ce que j’ai déjà dit au sujet des profits, on verra, je crois, qu’aucun déplacement du commerce étranger et aucun changement du commerce intérieur pour le commerce avec l’étranger, ne sauraient affecter le taux des profits. La perte qui en résultera est celle que je viens d’exposer ; elle consiste dans une moins bonne distribution des capitaux et de l’industrie, et par suite dans une diminution de production. Le prix naturel des produits haussera, et par conséquent, quoique le consommateur soit en état d’acheter pour une même valeur en argent, il n’obtiendra, avec cet argent, qu’une quantité moindre de marchandises. Et lors même que le monopole aurait pour effet de faire hausser les profits, il n’occasionnerait pas le moindre dérangement dans les prix ; car le prix n’est réglé ni par les salaires ni par les profits.

Adam Smith lui-même parait en convenir, quand il dit que « le prix des choses, ou la valeur de l’or et de l’argent, comparée aux marchandises, dépend de la proportion qu’il y a entre la quantité de travail nécessaire pour faire arriver au marché une certaine quantité d’or et d’argent, et la quantité de travail nécessaire pour y faire arriver une certaine quantité de marchandises d’une autre espèce. » Cette quantité restera la même, que les profits et les salaires montent ou baissent. Comment donc le prix peut-il hausser par l’effet des hauts profits ?