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De ces deux manières d’augmenter la richesse, on doit préférer la seconde, puisqu’elle produit le même effet sans nous priver de nos jouissances ni les diminuer, ce qui est inévitable dans la première.

Le capital d’un pays est cette portion de sa richesse qui est employée dans le but d’une production à venir. Il peut s’accroître de même que la richesse. Un surcroît de capital contribuera aussi effectivement à la production de la richesse future, qu’il provienne des améliorations dans les connaissances pratiques et dans les machines, ou de l’emploi d’une plus grande partie du revenu

    productifs s’accroissent, soit lorsque, sans être plus grands, ils produisent davantage. Ajoutons-y quelques éclaircissements.

    Par fonds productifs, j’entends les terres productives, les capitaux productifs, l’industrie productive. M. Ricardo, disciple en cela de Smith, n’entend que le travail. Dans sa première hypothèse, les capitaux accrus par l’épargne entretiendraient un plus grand nombre de travailleurs. Il y aurait plus de choses produites ; mais ces choses étant le résultat de plus de services productifs, seraient dans le même rapport de valeur avec les services productifs. Le pays aurait plus de producteurs (capitalistes ou industrieux), mais aussi il aurait plus de consommateurs. Chacun, avec le même revenu, n’obtiendrait que la même quantité de produits. M. Ricardo regarde cette augmentation de richesses comme la moins désirable.

    L’autre augmentation, en effet, est plus propre à procurer à chacun la libre disposition de plus de produits, de plus de jouissances. Elle consiste en un plus grand parti tiré des mêmes fonds productifs ; d’où résulte, sans la moindre diminution dans le revenu, une baisse dans la valeur des produits qui permet à chacun d’être mieux pourvu. (Voyez, ma dernière note, page 252.)

    Le revenu reste le même quand le fonds productif rend le double de produits, quoique moins chers de moitié. C’est une chose de fait que le raisonnement explique. Si par un meilleur, procédé on doublé le produit des terres en pommes de terre, par exemple, si l’on fait produire à chaque arpent cent setiers à 3 fr. au lieu de cinquante setiers à 6 fr., dans les deux cas l’arpent rapporte 300 fr. ; mais dans le premier cas, le produit est à moitié prix, et relativement à ce produit, non-seulement les revenus fonciers, mais tous les revenus sont doublés.

    De même, s’il est question d’un perfectionnement qui fait qu’un capital donne un produit doublé ; si, comme il est arrivé dans la fabrication des fils et tissus de coton, des machines valant 30,000 fr. ont donné le double des produits, de ce que la même somme produisait avec autant de travail et des machines moins parfaites, alors les produits de ce capital ont successivement baissé de prix par la concurrence. On en, a, eu le double en quantité, qui, en baissant de prix, ont néanmoins valu autant en somme. Les revenus capitaux n’en ont pas été altérés ; mais pour la même somme de revenu, chacun a pu obtenir le double de produits en cotonnades : le public a réellement été le double plus riche relativement aux cotonnades. — J.-B. Say.