Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/307

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Quoique Adam Smith ait donné de la richesse une idée exacte et dont j’ai déjà plus d’une fois fait mention, il en donne ensuite une

    seur des effets sera moins riche par rapport au possesseur de l’argent, ou celui-ci plus riche relativement à l’autre.

    Maintenant, avec ces données, essayons de résoudre la grande difficulté. Comment se fait-il que lorsqu’un objet devient plus abondant, lorsque les bas, par exemple, tombent à moitié prix, je sois tout à la fois moins riche en valeur et plus riche en jouissances ? La somme de mes bas portés à l’inventaire sera moindre, et cependant mes jouissances seront accrues, puisque j’aurai un plus grand nombre de paires.

    Ici l’on fait sans s’en douter une question multiple, c’est-à-dire plusieurs questions dans une seule ; voilà pourquoi il se peut qu’il y ait plusieurs réponses, et que ces réponses soient toutes justes, au moins dans le point de vue sous lequel on considère la question.

    Si vous vous considérez comme possesseur d’une certaine quantité de bas, et que les bas tombent à moitié prix, non seulement relativement à l’argent, mais relativement à toute autre espèce de marchandise, alors cette portion de vos richesses a diminué de moitié Relativement à toutes les autres ; ou, ce qui revient au même, toutes les autres richesses ont doublé par rapport à celle-là. Si vous acquériez en vendant une paire de bas six livres de sucre, vous n’en acquerrez plus que trois : vos jouissances en bas seront demeurées les mêmes.: mais si vous voulez les changer contre des jouissances en sucre, vous n’obtiendrez, plus de ces dernières qu’une moitié de ce que vous auriez obtenu. La somme des moyens de jouissances qui existaient dans la société, n’a ni augmenté ni diminué ; la somme des richesses non plus ; la valeur de toutes les marchandises par rapport aux bas (l’argent compris) a haussé précisément autant que la valeur des bas a baissé ; car, encore une fois, il est de l’essence de la valeur d’être relative. Quand on considère dans les choses une qualité absolue, comme la jouissance qui résulte de leur usage, on n’en considère plus la valeur échangeable. On considère une jouissance, et non plus une richesse.

    Que si vous considérez les bas, non plus comme une marchandise déjà produite, mais comme une marchandise pouvant se produire, et qui, en baissant à la moitié de son ancien prix, vous permet d’en consommer une double quantité, ou, ce qui revient au même, une qualité le double plus belle, sans pour cela faire un plus grand sacrifice, alors vous considérez la valeur des bas dans son rapport avec la valeur de votre revenu, et vous vous trouvez, relativement à ce produit en particulier, le double plus riche que vous n’étiez, puisqu’au moyen du même sacrifice vous obtenez en ce genre une double jouissance.

    C’est en ce sens que, bien que la valeur soit la seule mesure de la richesse, une baisse de prix est une augmentation de richesse, puisque alors votre revenu a doublé par rapport aux bas ; et si les perfectionnements dans les procédés de la production avaient été pareils pour tous les autres produits, votre richesse-revenu serait véritablement double. C’est comme si le fonds d’où vous tirez votre revenu avait doublé, soit que ce fonds fût en terres, en capital, ou bien en talents industriels.