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CHAPITRE XX.

DES PROPRIÉTÉS DISTINCTIVES DE LA VALEUR ET DES RICHESSES.


« Un homme est pauvre ou riche, dit Adam Smith, selon le plus ou moins de choses nécessaires, utiles ou agréables, dont il peut se procurer la jouissance. »

La valeur diffère donc essentiellement de la richesse ; car la valeur ne dépend pas de l’abondance, mais bien de la difficulté ou de la facilité de production. Le travail d’un million d’hommes produira toujours la même valeur industrielle, sans produire toujours la même richesse. Par l’invention de machines, par plus d’habileté, par une division mieux entendue du travail, ou par la découverte de nouveaux marchés où l’on peut faire des échanges plus avantageux, un million d’hommes peut, dans un état donné de la société, doubler ou tripler les richesses, les choses nécessaires, utiles ou agréables, que produisait auparavant le même nombre d’ouvriers ; mais on n’ajouterait rien par là à la valeur des produits. En effet, tout augmente ou baisse de valeur à proportion de la facilité ou de la difficulté de production, ou, en d’autres mots, à proportion de la quantité de travail employée dans la production.

Supposons qu’avec un capital donné, le travail d’un certain nombre d’ouvriers puisse produire mille paires de bas ; et que, par des inventions de machines, le même nombre d’hommes puisse en produire deux mille paires, ou qu’en continuant à produire mille paires, il puisse, de plus, fabriquer cinq cents chapeaux. Dans ce cas, la valeur des deux mille paires de bas, ou celle des mille paires de bas jointe à celle des cinq cents chapeaux, sera exactement la même qu’avaient les mille paires de bas avant l’introduction des machines, parce que ces différents produits seront le résultat de la même quantité de travail. Mais la valeur de la masse générale des denrées se trouvera cependant diminuée ; car, quoique la valeur des produits, augmentés par suite des procédés perfectionnés, soit exactement