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l’usage de l’ouvrier, aurait le même effet qu’un impôt sur le blé, qui ne diffère des autres choses nécessaires, que parce qu’il est, entre toutes, la première et la plus importante ; et cet impôt produirait précisément les mêmes effets sur les profits des capitaux et sur le commerce étranger. Mais un impôt sur les objets de luxe n’aurait d’autre effet que de les faire renchérir. Il retomberait en entier sur le consommateur, et il ne saurait ni faire hausser les salaires, ni faire baisser les profits.

Les impôts qu’on lève sur un pays pour les frais de la guerre ou pour les dépenses ordinaires du gouvernement, et dont le produit est principalement destiné à l’entretien d’ouvriers improductifs, sont pris sur l’industrie productive du pays ; et tout ce qu’on peut épargner sur de telles dépenses, est en général autant d’ajouté au revenu ou même au capital des contribuables. Quand on lève, par la voie d’un emprunt, 20 millions pour les dépenses d’une année de guerre, ce sont 20 millions que l’on enlève au capital productif de la nation. Le million annuel qu’on lève par des impôts pour payer les intérêts de cet emprunt, ne fait que passer des mains de ceux qui le paient dans celles de ceux qui le reçoivent, des mains du contribuable dans celles du créancier de l’État. La dépense réelle, ce sont les 20 millions, et non l’intérêt qu’il faut en payer[1].

    talents et les travaux industriels eux-mêmes ne changent pas d’objet sans de graves inconvénients. On aime mieux continuer à travailler dans un genre qui-rapporte moins, parce qu’il y aurait plus de perte encore à changer ; et cet effet se perpétue quelquefois un demi-siècle durant, c’est-à-dire tout le temps que dure bien souvent la forme d’administration et le système des contributions.

    Il est impossible de négliger des circonstances qui influent si puissamment sur les résultats ; on risque beaucoup de se tromper quand on n’a les yeux fixés que sur quelques grandi » principes, et qu’on ne veut compter pour rien les modifications qu’ils reçoivent des considérations accessoires. Les circonstances agissent en vertu de principes tout aussi incontestables, et qui, de même que les principes les plus généraux, dépendent de la nature des choses. — J.-B. Say.

  1. Melon dit que les dettes d’un État sont des dettes de la main droite à la main gauche dont le corps ne se trouve pas affaibli. À la vérité, la richesse générale n’est point diminuée par le paiement des intérêts ou arrérages de la dette : les intérêts sont une valeur qui passe de la main du contribuable dans celle du rentier de l’État : que ce soit le rentier ou le contribuable qui l’accumule ou la consomme, peu importe à la société, j’en conviens ; mais le principal de cette rente où est-il ? il n’est plus. La consommation qui a suivi l’emprunt a emporté un capital qui ne rapportera plus de revenu. La société est privée, non du montant des rentes, puisqu’il passe d’une main dans l’autre, mais du revenu d’un