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seront diminuées par l’effet, non-seulement de l’impôt en question, mais de tout autre moyen servant à prélever la même somme.

L’erreur d’Adam Smith vient d’abord de ce qu’il suppose que tout impôt payé par le fermier doit nécessairement retomber sur le propriétaire, sous la forme d’une réduction de rente. Quant à cet objet, je me suis déjà expliqué dans le plus grand détail, et je me flatte d’avoir démontré, à la satisfaction du lecteur, que puisqu’un capital considérable est employé sur les terres qui ne paient pas de rente, et puisque c’est le résultat obtenu au moyen de ce capital qui règle le prix des produits agricoles, il ne saurait être fait de déduction dans les rentes. Par conséquent, ou il ne sera point accordé de compensation au fermier pour l’indemniser de l’impôt sur les salaires ; ou, s’il en obtient une, ce ne sera qu’au moyen d’un renchérissement des produits agricoles.

Si l’impôt est trop onéreux pour le fermier, il pourra élever le prix de ses denrées premières, afin de se mettre de niveau avec les autres commerçants : mais un impôt sur les salaires, qui ne pèserait pas plus sur son commerce que sur celui des autres, ne pourrait ni être rejeté sur ceux-ci, ni compensé par la hausse des produits agricoles ; car le même motif qui pourrait l’engager à élever le prix du blé, c’est-à-dire, le désir de se rembourser de l’impôt, déciderait le fabricant de draps à élever le prix de ses étoffes, et le cordonnier, le chapelier et le tapissier, à augmenter le prix de la chaussure, des chapeaux et des meubles.

S’ils peuvent tous augmenter le prix de leurs marchandises de manière à se rembourser avec profit de l’impôt, puisqu’ils sont tous consommateurs, chacun des marchandises des autres, il est évident que l’impôt ne serait jamais payé ; car si tout le monde en trouve la compensation, où seraient les contribuables ?

J’espère donc avoir réussi à prouver que tout impôt qui peut occasionner une hausse des salaires, sera payé moyennant une diminution des profits, et par conséquent qu’un impôt sur les salaires n’est réellement qu’un impôt sur les profits.

Ce principe fondamental du partage du produit du travail et du capital, entre les salaires et les profits, que je me suis efforcé d’établir, me paraît si certain, qu’à l’exception de l’effet immédiat, je suis disposé à croire qu’il importe peu lequel des deux on impose, des profits du capital ou des salaires du travail. En imposant les profits du capital vous changerez probablement le taux d’accroissement progressif des fonds destinés à entretenir les travailleurs, et les