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autres genres de commerce, et il se verrait forcé de quitter son métier pour un autre.

De la même manière, un impôt sur les profits du fermier ferait hausser le prix du blé ; un impôt sur les profits du fabricant de drap ferait renchérir le drap ; et si on mettait un impôt proportionnel sur tous les commerces, toutes les marchandises hausseraient de prix. Si cependant la mine qui nous fournit le métal dont nous fabriquons notre monnaie se trouvait chez nous, et que les profits de l’exploiteur fussent imposés de même, il n’y aurait point de hausse dans le prix d’aucune denrée ; chacun donnerait une portion pareille de son revenu, et tout resterait comme auparavant.

Si l’on n’impose pas le numéraire, et qu’il puisse par conséquent conserver sa valeur pendant que toutes les autres denrées sont imposées et renchérissent, le chapelier, le fermier et le fabricant de drap, chacun employant un capital égal, qui rapporte des profits pareils, paieront la même quantité de l’impôt. Si cet impôt est de 100 l., la valeur des chapeaux, du drap et du blé augmentera de 100 l. Si le chapelier gagne 1100 l. sur ses chapeaux, au lieu de 1000 l., il paiera 100 l. d’impôt au gouvernement, et il lui restera toujours 1000 l. à dépenser à des objets de sa propre consommation. Cependant, comme le drap, le blé et toutes les autres denrées auront haussé de prix par la même cause, il n’aura pour ses 1000 l. que ce qu’il pouvait acheter auparavant pour 910 l., et il contribuera ainsi, par la réduction de sa dépense, aux besoins de l’État. En payant cet impôt, il aura mis une portion du produit de la terre et de l’industrie nationale à la disposition du gouvernement, au lieu d’employer cette portion à son propre usage. Si, au lieu de dépenser ses 1000 l., il ajoute cette somme à son capital, il verra par la hausse des salaires et par le renchérissement des matières premières et des machines, que cette épargne de 1000 l. n’est que l’équivalent de ce qu’aurait valu auparavant une épargne de 910 l.

Si l’on impose le numéraire, ou si la valeur en est changée par toute autre cause, pendant que toutes les denrées restent précisément au même prix qu’auparavant, les profits du manufacturier et du fermier seront aussi, comme par le passé, de 100 l. Chacun d’eux ayant à payer 100 l. au gouvernement, il ne leur restera que 900 l., et ils ne pourront disposer que d’une moindre portion des produits du sol ou de l’indu!trie nationale, qu’ils emploient cette somme au profit d’une industrie productive ou improductive. Ce qu’ils perdent est alors précisément ce que le gouvernement gagne.