Page:Ricardo - Œuvres complètes, Collection des principaux économistes,13.djvu/228

Cette page a été validée par deux contributeurs.

portera sur le loyer du bâtiment et sur le loyer du sol. Il est probable que, dans le premier cas, elle porterait sur l’un comme sur l’autre ; mais comme des maisons sont des choses périssables, quoiqu’elles ne se détériorent que lentement, et comme on n’en bâtirait plus jusqu’à ce que le profit de l’entrepreneur de bâtiments fût de niveau avec le profit des autres commerces, le loyer des bâtiments reviendrait, après un certain intervalle de temps, à son prix naturel. L’entrepreneur de bâtiments ne recevant de loyers que tant que la maison est debout, ne peut pas, dans les circonstances les plus désastreuses, payer longtemps une partie quelconque de l’impôt.

Cet impôt pèserait donc en définitive sur le locataire et sur le propriétaire du terrain. Mais « dans quelle proportion (demande Adam Smith) ce paiement final se partagera-t-il entre eux ? C’est ce qui n’est pas très-facile à décider. Ce partage se ferait probablement d’une manière très-différente dans des circonstances différentes ; et un impôt de ce genre, d’après ces circonstances différentes, affecterait d’une manière très-inégale le locataire de la maison et le propriétaire du terrain. »

Adam Smith regarde les loyers du sol comme un objet très-propre à être imposé. « Les loyers du sol, dit-il, et les rentes ordinaires des terres, sont une espèce de revenu dont le propriétaire jouit le plus souvent sans avoir ni soins ni attention à donner. Quand une partie de ce revenu lui serait ôtée pour fournir aux besoins de l’État, on ne découragerait par là aucune espèce d’industrie. Le produit annuel des terres et du travail de la société, la richesse et le revenu réel de la masse du peuple pourraient toujours être les mêmes après l’impôt qu’auparavant. Ainsi le loyer du sol et les rentes ordinaires des terres sont peut-être l’espèce de revenu qui peut le mieux supporter un impôt spécial. »

Il faut convenir que les effets de ces sortes d’impôts seraient tels que le dit Adam Smith ; ce serait pourtant assurément une grande injustice, que d’imposer exclusivement le revenu d’une classe particulière de la société. Les charges de l’État doivent être supportées par tous, et être en raison des facultés de chacun : c’est là une des quatre maximes posées par Adam Smith, et qui doivent servir de règle pour tout impôt. La rente appartient souvent à ceux qui, après bien des années de peines, ont fini par réaliser leurs profits, et ont employé leur fortune à l’achat d’un fonds de terre. Ce serait donc bien certainement au mépris de la sûreté des propriétés, principe qui