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Si on levait pour le clergé une valeur égale par d’autres moyens qui augmenteraient ainsi que la dîme, à proportion de la difficulté de la culture, l’effet serait le même. Et on se tromperait fort en pensant que les dîmes, parce qu’elles sont prélevées directement sur le sol, découragent plus l’agriculteur que toute autre redevance du même chiffre. Le clergé, dans les deux cas, obtiendrait une portion croissante du produit net du sol et de l’industrie du pays. Dans l’état progressif de la société, le produit net du sol va toujours en diminuant par rapport au produit brut ; mais c’est sur le produit net d’un pays que sont levés, en dernière analyse, tous les impôts, que le pays se trouve en voie de développement ou reste stationnaire. Un impôt qui augmente en même temps que le revenu brut, et qui retombe sur le revenu net, doit être nécessairement un impôt très-onéreux, et extrêmement oppressif. La dîme est le dixième du produit brut, et non le dixième du produit net du sol : et par conséquent à mesure que la société croît en richesse, elle doit progressivement absorber une partie plus considérable du produit net, quoiqu’elle soit toujours égale à une même portion du produit brut.

On peut encore regarder la dîme comme nuisible aux propriétaires fonciers, en ce qu’elle agit comme prime d’importation, en imposant le blé indigène, pendant que celui de l’étranger ne paie aucun impôt. Et si, dans le but de mettre les propriétaires à l’abri de l’avilissement des terres que doit occasionner cette prime, on frappait le blé du dehors d’un impôt pareil, perçu par l’État, il ne pourrait y avoir de mesure plus juste ni plus équitable, puisque tout ce que cet impôt rapporterait à l’État, aurait l’effet de diminuer d’autant les autres impôts que les dépenses du Gouvernement rendent nécessaires. Mais si un pareil impôt n’était consacré qu’à augmenter les revenus du clergé, il pourrait à la vérité augmenter au total la masse des produits, mais il diminuerait la part qui revient aux classes productives.

Si on laissait entièrement libre le commerce des draps, nos manufacturiers pourraient les donner à meilleur marché qu’on ne pourrait les importer. Si on mettait un impôt sur la fabrication des draps du pays, et qu’on n’en mit point sur l’importation, cela pourrait avoir le mauvais effet de détourner les capitaux de la fabrication des draps vers d’autres manufactures, le drap pouvant alors être tiré de l’étranger à meilleur marché que celui qu’on fabriquerait dans le pays. Le consommateur, qui préférait d’abord acheter son drap dans