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100 liv. ; mais mon capital ne serait pas entamé si, après avoir payé cet impôt, je me contentais de ne dépenser que 900 liv.

Le désir que tout homme a de maintenir son rang dans le monde, et de conserver intacte sa fortune, fait que la plupart des impôts sont payés par le revenu, qu’ils se trouvent, d’ailleurs, assis sur les capitaux ou sur les revenus. Par conséquent, à mesure que les impôts augmentent, ainsi que les dépenses du gouvernement, la dépense annuelle de la nation doit diminuer, à moins que le peuple ne puisse augmenter son capital et son revenu dans les mêmes proportions. Il est de l’intérêt de tout gouvernement d’encourager cette disposition dans le peuple, et de ne jamais lever des impôts qui atteignent inévitablement les capitaux ; car on attaque ainsi le fonds destiné à l’entretien de l’industrie, et on diminue par conséquent la production future du pays[1].

On n’a point suivi ce système en Angleterre, quand on a imposé les pièces probantes des testaments, et qu’on a établi des impôts sur les transmissions de propriété du mort au vif. Si un legs de 1,000 liv. est sujet à un impôt de 100 liv. le légataire regarde son legs comme n’étant que de 900 l. et n’éprouve aucune envie d’épargner le droit de 100 liv. sur sa dépense, et il en résulte que le capital national est diminué. Mais s’il avait réellement reçu 1,000 liv., et qu’on lui fit payer 100 l. d’impôts sur son revenu, sur le vin, sur les chevaux, sur les domestiques, il eût probablement diminué, ou plutôt il n’eût point augmenté sa dépense d’une pareille somme, et le capital national serait resté le même.

« Des impôts sur les transmissions de propriété du mort au vif (dit Adam Smith) tombent ou immédiatement ou définitivement sur la personne à laquelle cette propriété est transmise. Les impôts sur les ventes de terres tombent en totalité sur le vendeur. Le vendeur est presque toujours dans la nécessité de vendre, et est dès lors obligé de prendre le prix qu’il peut avoir. L’acheteur, au contraire, n’est presque jamais dans la nécessité d’acheter, et ne donne par conséquent que le prix qu’il lui plaît de donner. Il calcule ce que la terre lui coûtera tant en achat qu’en im-

  1. Lorsque le gouvernement, comme il arrive en Angleterre, dépense annuellement une forte somme levée par les emprunts, alors il dépense évidemment une portion du capital du pays, ou du moins des accumulations de l’année, qui, sans cela, seraient allées grossir le capital productif du pays. — J.–B. Say