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l’argent se maintient toujours la même, on en donnera davantage en échange pour du blé ; en d’autres termes, le blé haussera de prix. Tout perfec­tionnement dans les machines et dans les manufactures, qui rendra la fabrication des objets manufacturés plus aisée et plus avantageuse, déterminera dans le prix du blé une hausse analogue ; car il amènera la surabondance du numéraire, qui, baissant de valeur, s’échangera contre moins de blé.

Mais les effets de la hausse du blé, quand cette hausse provient de l’augmentation de sa valeur ou de la dépréciation du numéraire, sont entièrement différents. Dans les deux cas, le prix métallique des salaires s’élèvera ; mais si la hausse vient de la dépréciation du numéraire, non-seulement les salaires et le blé, mais encore toutes les autres denrées hausseront. Si le manufacturier paie de plus forts salaires, il retirera plus d’argent de ses objets manufacturés, et le taux des profits ne variera pas. Mais lorsque le blé hausse de prix, en raison de la diffi­culté augmentée de sa production, les profits doivent diminuer ; car le manufacturier sera obligé de payer de plus forts salaires, sans pouvoir s’en dédommager par l’augmentation du prix de ses ouvrages manufacturés.

Tout perfectionnement qui facilite l’exploitation des mines, et au moyen duquel on obtient les métaux précieux avec une économie de travail, doit faire baisser la valeur de l’argent dans tout pays. Partout on obtiendra en échange d’une quantité donnée d’argent, une moindre quantité de marchandises ; mais si un pays excelle en industrie manufacturière, et si par con­sé­quent l’argent y afflue, sa valeur y sera moindre, et les prix du blé et de la main-d’œuvre y seront plus élevés relativement à tout autre pays.

Cette augmentation dans les prix n’affecte pas le cours du change ; car on peut continuer à négocier des lettres de change au pair, quoique les prix du blé et de la main-d’œuvre soient dans un pays 10, 20 ou 30 % plus élevés que dans l’autre. Dans un état de choses tel que nous le supposons, une pareille différence dans les prix est dans l’ordre naturel des choses ; et pour que le change reste au pair, il faut qu’il soit introduit une quantité suffisante d’argent dans le pays qui excelle en manufactures, pour y faire hausser le prix du blé et de la main-d’œuvre. Si dans les pays étrangers on prohibait l’exportation du numéraire, et que cette loi prohibitive pût être exactement exécutée, cela pourrait bien empêcher les prix du blé et de la main-d’œuvre de hausser dans le pays de manufactures ; car la hausse, en l’absence d’un papier-monnaie, ne peut s’opérer que par