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La tendance funeste de ces lois n’est plus un mystère depuis qu’elle a été dévoilée par la plume habile de M. Malthus, et tous les amis des pauvres devraient désirer ardemment de les voir abolies. Par malheur, elles sont établies depuis si longtemps, et les pauvres ont contracté de telles habitudes sous leur influence, qu’il faudrait beaucoup de précautions et d’adresse pour pouvoir les extirper sans danger de notre système politique. Ceux même qui sont le plus résolus à abolir ces lois, conviennent qu’il faut opérer lentement, graduellement, si l’on veut empêcher ceux en faveur de qui ces lois furent faites mal à propos, d’être accablés par la misère[1].

C’est une vérité incontestable, que l’aisance et le bien-être des pauvres ne sauraient être assurés, à moins qu’ils ne cherchent eux-mêmes, ou que la législature ne les conduise à diminuer la fréquence des mariages entre des individus jeunes et imprévoyants. Le système de la législation sur les pauvres a agi dans un sens tout à fait opposé. Il a rendu toute contrainte superflue ; et l’on a séduit la jeunesse imprudente en lui offrant une portion des récompenses dues à la prévoyance et à l’industrie[2].

    ne saurait soulager ; et il est utile par conséquent de connaître les limites dans lesquelles elle doit se renfermer, afin d’éviter qu’en visant à ce qui est impraticable, nous ne manquions le but utile qu’il est en notre pouvoir d’atteindre. » — Buchanan, p. 61.

  1. Cette vieille législation des pauvres, criblée d’abus, et ruineuse pour la Grande-Bretagne, au point d’avoir absorbé, en 1818, 7,870,801 livres sterlings, et, en 1832, le chiffre colossal de 8,739,882 livres sterlings, a été complètement réformée par l’acte de 1834 auquel on a donné le nom par trop modeste d’amendement. Dans le fond, il y a eu substitution d’un système entièrement nouveau dans les annales de la charité légale. Ce système est celui des Work-Houses ou ateliers de charité qui s’ouvrent comme un refuge devant les ouvriers inoccupés, et leur distribuent la nourriture, le vêtement, le logement en échange de leur travail. — Voyez, pour l’esquisse de cette nouvelle législation, le chapitre XVIII : Des Taxes pour les pauvres. A. F.
  2. Les progrès que l’opinion publique a faits sur cette grave question depuis 1796 sont très-remarquables, et il est facile de les constater en comparant le dernier rapport des commissaires de la loi des pauvres, avec les paroles suivantes prononcées par M. Pitt, il y a près de trente ans : — « Faisons, des secours à répandre dans les familles nombreuses, un lien d’honneur et de charité et non un signe d’opprobre et de mépris. On fera ainsi des enfants du pauvre une bénédiction et non une calamité : et l’on tracera une ligne de démarcation rationnelle et digne entre ceux qui sont capables de se suffire au moyen de leur travail, et ceux qui, après avoir doté leur pays d’un grand nombre d’enfants, ont acquis le droit de réclamer les moyens de les élever. » — Histoire parlementaire de Hansard, v. 32, p. 710.