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son de la quantité de matière première qui entre dans leur composition, et il lui faudra payer davantage pour les obtenir. Quoique le thé, le sucre, le savon, la chandelle et le loyer de sa maison ne lui coûtent peut-être pas plus cher, le lard, le fromage, le beurre, le linge, la chaussure et l’habillement lui coûteront davantage ; et par conséquent, malgré l’augmentation des salaires, sa position sera devenue comparativement plus mauvaise. On pourrait m’objecter que je considère toujours l’effet des salaires sur les prix, en partant de la supposition que l’or et les métaux qui servent à frapper les monnaies sont un produit du pays où il y a variation dans les salaires, et que les conséquences que j’en tire s’accordent mal avec l’état actuel des choses, parce que l’or est un métal que nous tirons de l’étranger. Mais de ce que l’or est le produit de l’étranger, il ne s’ensuit pas que l’argument soit moins vrai ; car l’on peut démontrer que les effets seraient, en dernière analyse, les mêmes, soit que l’on trouvât l’or dans le propre pays, soit qu’on le retirât de l’étranger.

Lorsque les salaires haussent, c’est que l’augmentation de la richesse et des capitaux augmente en général la demande de bras, qui doit infailliblement être suivie d’une production plus considérable de denrées. Pour mettre dans la circulation ce surcroît de denrées, même aux anciens prix, il faudra plus d’argent, plus de cette matière tirée de l’étranger, dont on fabrique la monnaie, et que l’on ne peut se procurer que par l’importation. Toutes les fois que la demande d’un article devient plus forte, sa valeur relative hausse par rapport aux autres objets avec lesquels on l’achète. Si l’on demandait plus de chapeaux, leur prix hausserait, et l’on donnerait plus d’or en échange. Si c’est l’or dont la demande est plus forte, l’or haussera, et les chapeaux baisseront de prix, car il faudra une plus grande quantité de chapeaux et d’autres articles pour acheter la même quantité d’or. Mais dire, dans le cas supposé, que les denrées haussent en raison de la hausse des salaires, ce serait une contradiction manifeste ; car nous dirions d’abord que l’or hausse de valeur relative par suite de la demande, et ensuite que sa valeur relative doit baisser, parce que les prix haussent, — deux phénomènes absolu­ment incompatibles. Dire que les denrées haussent de prix, c’est dire que la valeur relative de la monnaie baisse ; car ce sont les denrées qui servent à estimer la valeur relative de l’or. Si le prix de toutes les denrées haussait, l’or étranger ne viendrait certainement pas les acheter pendant qu’elles seraient chères ; il sortirait, au contraire, du pays pour être avantageusement employé, à l’étranger, à l’achat de denrées qui sont à