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ces agents donneraient une rente, qui se développerait à mesure que l’on utiliserait leurs différentes qualités. Plus on descendrait dans l’échelle des qualités, et plus hausserait la valeur des produits fabriqués avec ces agents, parce que des quantités égales de travail industriel donneraient moins de produits. L’homme travaillerait plus de son corps, la nature ferait moins, et la terre ne jouirait plus d’une prééminence fondée sur la limitation de ses forces.

Si l’excédant de produit qui forme la rente des terres est réellement un avantage, il est à désirer alors que, tous les ans, les machines récemment construites deviennent moins productives que les anciennes. Cela donnerait, en effet, plus de valeur aux marchandises fabriquées, non-seulement avec ces machines, mais avec toutes celles du pays ; et l’on paierait alors une rente à tous ceux qui posséderaient les machines plus productives[1].

  1. « D’ailleurs, dans la culture de la terre (dit Adam Smith), la nature travaille conjointement avec l’homme ; et quoique le travail de la nature ne coûte aucune dépense, ce qu’il produit n’en a pas moins sa valeur, aussi bien que ce que produisent les ouvriers les plus chers. » On paie la nature pour son travail, non en raison de ce qu’elle fait beaucoup, mais parce qu’elle fait peu. À mesure qu’elle se montre avare de ses dons envers nous, elle exige plus de prix de son ouvrage. Quand elle est généreuse et libérale, elle travaille toujours gratuitement. « Les bestiaux employés à l’agriculture, non-seulement contribuent par leur travail, comme les ouvriers des manufactures, à la reproduction d’une valeur égale à leurs propres consommations, ou au capital qui les emploie, en y ajoutant les profits des capitalistes ; mais ils produisent encore une valeur bien plus grande. Outre le capital du fermier et tous ses profits, ils reproduisent régulièrement le fermage du propriétaire. On peut considérer ce fermage comme le produit de cette puissance de la nature dont le propriétaire prête la jouissance au fermier ; il est plus ou moins fort, selon qu’on suppose à cette puissance plus d’étendue, ou, en d’autres termes, selon la fertilité naturelle ou artificielle dont on suppose la terre susceptible. C’est l’œuvre de la nature qui reste, après qu’on a déduit ou compensé tout ce qu’on peut regarder comme l’œuvre de l’homme. C’est rarement moins du quart, et souvent plus du tiers du produit total. Jamais une pareille quantité de travail productif employé en manufactures ne saurait opérer une aussi grande reproduction. Dans celles-ci la nature ne fait rien, c’est l’homme qui fait tout. Et la reproduction doit être toujours en raison de la puissance des agents qui l’opèrent. Ainsi, non-seulement le capital employé à l’agriculture met en activité une plus grande quantité de travail productif que tout autre capital d’égale valeur employé en manufactures, mais encore à proportion de la quantité de travail productif qu’il emploie, il ajoute une beaucoup plus grande valeur au produit annuel des terres et du travail du pays, à la richesse et au revenu réel de ses habitants. De
1. Oui, mais l’appropriation inclusive dans les arts n’étant point indispensable pour que le produit existe, on se passerait de celui qui voudrait faire payer la pesanteur de l’atmosphère ou la chaleur du soleil. La quantité offerte des produits des arts n’en étant pas moindre, leur prix ne monterait jamais au point de fournir un profit à ce propriétaire imaginaire. —J.-B. Say.