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Dans chacun des groupes de cette seconde classe se trouvent des types fort variés. C’est là qu’il faut placer la plupart des grands mystiques qui relèvent d’une religion positive et qui font parfois tout autant pour leur progrès personnel que les mystiques de notre première classe, chez qui n’interviennent pas les pratiques religieuses. On y mettrait les saints en qui se montre une moralité supérieure ou singulière, des artistes comme Giotto et Fra Angelico, des philosophes et des savants, maîtres de la science du passé ou travaillant à constituer celle de l’avenir, comme Albert le Grand, saint Thomas d’Aquin ou Roger Bacon, pour qui le but suprême est la christification, la déification, autant qu’elle est possible à l’homme en cette vie. Saint Thomas, en particulier, fut un guide et un modèle pour les hommes qui suivirent. Son œuvre compliquée et travaillée comme une cathédrale gothique, utilise pour la vision de Dieu, tous les moyens et tous les intermédiaires qui l’ont jamais facilitée, mais qui parfois nous font uniquement sentir combien grand est l’intervalle qui nous sépare de l’Être infiniment parfait.

Voici saint François d’Assise et aussi l’auteur de l’Imitation de J.-C. qui restreignent sans doute beaucoup le domaine à cultiver, mais qui donnent à leur conception une puissance et un éclat tels que les imitateurs les suivront en foule.

Voici les mystiques allemands[1] qui simplifient la marche vers

  1. Le récent travail, d’un intérêt considérable, de M. Henri Lichtenberger, a paru dans la Revue des Cours et Conférences : 18 mai 1910, Le mystique Suso, Les origines du mysticisme allemand, p. 433-447 ; 9 juin 1910, L’œuvre de Suso, l’Exemplaire, avec ses quatre parties, la Vie, le Livre de la Sagesse éternelle, le Livre de la Vérité, le Petit recueil de lettres spirituelles ; les Œuvres non comprises dans l’Exemplaire, les Lettres spirituelles, les Sermons et le Minnebüchlein ; l’authenticité de l’Exemplaire, p. 600-612 ; 23 juin 1910, Mysticisme pratique de Suso, d’après le Livre de la Sagesse éternelle, Apologie de la souffrance, Souffrances physiques, Souffrances spirituelles ; composition du livre de la Sagesse éternelle, première partie, seconde partie, valeur poétique, p. 683-695 ; 17 novembre 1910, Le mysticisme spéculatif de Suso, d’après le Livre de la Vérité, l’Unité suprême ou divinité. Unité et multiplicité en Dieu, Retour de la créature vers Dieu par le Christ, L’union mystique, p. 7-14 ; 24 novembre 1910, La vie de Suso, Naissance et famille de Suso, Débuts dans la vie religieuse, Études de Suso, Suso lecteur de Constance, Activité pastorale de Suso, Départ de Constance, Émigration à Ulm, p. 73-81 ; 8 décembre 1910, Examen critique de la Vie, Manuscrits et rédactions, Première partie, seconde partie, troisième partie, Résultats généraux de l’analyse critique, Une Vie de Suso qui semble provenir d’une combinaison d’éléments assez divers et qui ne présente pas une rigoureuse unité ; Une seconde Vie de Suso directeur de conscience et père spirituel d’Elsbeth Stagel, avec lettres ou entretiens de Suso et de Stagel, insérés dans la trame du récit, Un traité de mysticisme spéculatif présenté extérieurement sous la forme de correspondance ou de dialogue entre Suso et sa fille spirituelle, mais