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surtout par des canons logiques, qui sont bien généraux et bien indéterminés ; ce qui est plus intéressant pour le psychologue et’le méthodologiste, ce sont les Leitmotive qui s’y retrouvent ; d’une part, sous forme d’opérations à faire isoler, renforcer, substituer, compenser, composer, tarer, ramener au zéro, déterminer les valeurs extrêmes, rechercher les phénomènes inverses’ (chap. X !i) ; construire des hypothèses et résoudre des problèmes (chap. xiv et xv) ; d’autre part. sous forme d’idées à considérer la similitude, l’analogie (chap. xm) ; la relation de cause à effet (chap. xvi). H y a là, surtout dans le texte allemand, une abondance tout à fait intéressante de matériaux pour une épistémologie vraiment objective des sciences expérimentales.

La fin de l’ouvrage nous ramène à des études non plus actuelles, mais rétrospectives. D’une façon générale, elles ont trait au développement historique des facultés intellectuelles et à la genèse des idées dites rationnelles l’origine psychologique de nos diverses formes de raisonnement, celle du nombre etde la mesure ; l’opposition de l’espace métrique, parfaitement homogène et isotrope, et de l’espace physiologique (c’est-à-dire de l’espace tel que nous nous le représentons spontanément, différencié par la perspective visuelle et par le sens musculaire, ayant un haut et un bas, une droite et une gauche) ; l’opposition du temps physiologique (la durée pure de M. Bergson) et du temps métrique, également homogène et mesuré par le mouvement, tel que le considère le physicien. Plusieurs de ces études ont déjà paru séparément dans le Monist, et ont été analysées ici même au moment de leur publication

En résumé les lois naturelles sont <’ les restrictions que, conduits par l’expérience, nous prescrivons à notre attente des phénomènes (368). Elles ne sont rien de plus. L’idéal, quelquefois atteint, mais rarement, serait de restreindre si bien cette attente, dans un cas donné, qu’il ne restât plus qu’une seule possibilité. Tout le progrès de la science consiste à se rapprocher de plus en plus de ce cas-limite. On a donc tort de dire couramment que les lois de la nature existent avant d’être reconnues par l’homme 3 (369) elles sont un produit du besoin que nous éprouvons de retrouver notre chemin dans la nature et cela se voit nettement dans le caractère de ces lois, qui participent toujours, à la fois, et de ce besoin, et de l’état de la civilisation où elles ont été formulées. Démonologiques et poétiques en Grèce, elles se déterminent au temps de Copernic et de Galilée par des considérations d’harmonie et d’élégance logique ; plus tard par des considérations de simplicité (Fresnel) où l’on croit voir une sorte de caractère

1. C’est exactement l’idée de la Chasse de Pan dans le De .~M~me/t~M <t’a ?Mlatio e.fpeWmen~t, !’nt)f)’MO experimenti, compulsio e.Bpf’rHMe, etc.

2. Voir Revue philosophique, 1902, I, 111 ; 1903, I, 113.

3. Cf. dans Studies in Humanism de Schiller, la question de savoir si la réalité est antérieure à la vérité. - Revue philosophique, 1908, I, 16-20.