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G. RAGEOT. LES FORMES SIMPLES DE L’ATTENTION

son évolution, de telle sorte qu’il soit devenu à son terme à peu près le contraire de ce qu’il était dans son principe ? Les pages excellentes que M. Ribot a consacrées à « l’attention spontanée » et à ses commencements « biologiques » expriment bien cette préoccupation génétique. Mais déjà Wundt avait montré que la distinction de l’attention spontanée et de l’attention volontaire ne touche pas le fond des choses. Dans le premier de ces cas, avait-il dit, l’attention est immédiatement déterminée par les représentations qui lui sont offertes ; dans le second cas, au contraire, il y a lutte ou antagonisme entre plusieurs représentations. Mais il s’agit toujours d’une activité qui survient à la suite « d’irritants internes ». Depuis, le regretté Marillier a insisté dans le même sens. « Que ce soit par son intensité propre ou par celle des états de conscience qui lui sont associés, qu’une représentation devienne dominante », peu importe. Le mécanisme est identique, car « nous ne pouvons pas à notre gré faire varier l’intensité de nos représentations ». Nous renoncerons donc ici à cette terminologie qui se rencontre chez les meilleurs auteurs, Sully, Höffding, Baldwin, Kreibig, et nous verrons que l’attention spontanée de M. Ribot n’est pas, à vrai dire, une attention.

Suivant la remarque de Külpe, chaque psychologue conçoit à sa façon la nature et l’origine de l’attention. Tout le monde presque a bien vu les éléments de l’attention. Mais, parmi ces éléments, si nous voulons retrouver l’ordre d’importance et de succession, il ne faut pas nous borner à l’analyse de l’état complexe et tout formé. On a sans cesse confondu l’attention, comme mode particulier de la perception ou de l’image, avec le sentiment de conscience, l’émotion-état, l’affection sui generis, qui peut accompagner ce mode intellectuel, mais qui ne le suscite à aucun degré. Je formulerai donc ainsi le problème de l’attention : l’attention comprend un élément perceptif et un élément affectif ; déterminer le rapport de ces deux éléments. Or, ne peut-on pas trouver des formes simples ou simplifiées d’attention dans lesquelles seraient saisissables et distingués, alors qu’ils commencent seulement de s’orienter l’un vers l’autre ou au contraire de se dissocier, ces deux facteurs primitifs dont la fusion ultérieure et l’unité associative ont rendu à peu près inextricable pour la conscience développée cette question de l’attention ?

I

Le réflexe psycho-physiologique est une réplique immédiate et partielle à l’excitation périphérique ; l’émotion est une riposte d’en-