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sèche, exclusivement intellectualiste de la génération, précédente. Mais nous pensons aussi que, dans dix ans, on ne lira pas sans quelque étonnement cette définition de la croyance page (p. 305) « Si nous faisons sérieusement réflexion sur quelque croyance profonde. nous devrons reconnaître la vérité de cette remarque c’est un chant intérieur, « l’hymne du cœur o de nos pensées qui se poursuit en nous sous la forme d’une mélodie ininterrompue. Du lyrisme, la croyance n’a pas seulement gardé le don extérieur encore de vibrer ou de frémir, l’élan, l’intensité. elle eu a surtout l’agilité et l’éclat, la faculté de pure expansion, ce mouvement ascensionnel qui la redresse et l’élève, avec ce vol actif et résolu d’une pensée qui ne s’arrête qu’aux sommets. »

JULES PAYOT.

III. — Sociologie.

E. Fournière. – Essai sur l’individualisme. – 1 vol. in-12, 188 p., de la Bibliothèque de philosophie contemporaine, F. Alcan.

Dans ce livre, M. Fournière s’est proposé de détruire une opposition d’idées inexacte.

On oppose généralement l’un à l’autre l’Individualisme et le Socialisme. — La source de cette erreur est dans la confusion que l’on fait entre l’individualisme métaphysique et l’individualisme réel. L’individualisme métaphysique est à l’individualisme réel ce que le mot est à la chose. L’individualisme métaphysique se fonde sur le concept de liberté pure liberté d’indifférence et d’indépendance absolues supposée initialement égale chez tous les individus humains. C’est en se plaçant au point de vue de cette liberté abstraite qu’on a cru voir dans le socialisme une menace de tyrannie collective et d’anéantissement de la personnalité.

L’individualisme réel est tout différent. De ce point de vue M. Fournière définit la liberté : « La faculté pour tout individu de s’assurer toutes les satisfactions que réclame son être physique et mental » (p. 5). Ce concept de la liberté est parfaitement intelligible et réalisable. Et certains socialistes ont tort de le méconnaître. « Confondant cette liberté toute relative et d’un caractère exclusivement social avec la liberté innée et immanente que les métaphysiciens spiritualistes attribuent à l’individu et que les métaphysiciens économistes attribuent même à l’ouvrier qui ne possède que ses deux bras, ils s’écrient avec Paul Lafargue « La liberté est une blague bourgeoise ! N (p. 6). « Les hommes, continue M. F., ne sont ni des dieux immuables et sereins, ni des cristaux immobiles et symétriques. Au regard de l’univers, il est bien entendu qu’ils n’ont pas,plus de liberté qu’un puceron ou qu’une pierre, et qu’ils obéissent au déterminisme universel. Mais dans leurs rapports avec leurs semblables, encore que ces rapports