Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 33.djvu/595

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
591
a. fouillée. — existence et développement de la volonté

sans un élément central et cérébral quia pour corrélatif l’intensité du vouloir, du désir et de l’effort ? Pour avoir un levier, il faut avoir une puissance et une résistance ; la constante nécessité de l’une n’empêche pas, mais implique, au contraire, la constante nécessité de l’autre.

« En soulevant un objet, dit Münsterberg, je ne puis découvrir aucune sensation d’énergie volitionnelle. Je perçois, en premier lieu, une légère tension à la tête, mais cette tension résulte d’une contraction des muscles de la tête, et non d’un sentiment de décharge cérébrale. En effet, je sens la tension sur le côté droit de la tête lorsque je meus le bras droit, tandis que la décharge motrice a lieu dans le côté gauche du cerveau. Dans les contractions extrêmes des muscles du corps et des membres surviennent, comme pour les renforcer, ces contractions spéciales des muscles de la face (spécialement le mouvement des sourcils et le serrement des dents) et ces tensions de la peau de la tête. Ces mouvements sympathiques sont sentis particulièrement du côté qui fait l’effort. Ils sont peut-être la raison fondamentale qui nous fait attribuer notre sentiment de contraction extrême à la région de la tête, et l’appeler une conscience d’énergie, au lieu d’une sensation périphérique. » Ces observations de Münsterberg montrent bien que nous ne pouvons accomplir un grand effort d’un membre sans une irradiation de l’onde nerveuse qui entraîne des mouvements sympathiques et synergiques, et cela, principalement du côté du corps qui est en jeu (y compris la tête). Les sensations afférentes sont alors très vives, très nombreuses, très diversifiées ; elles sont donc très visibles dans le champ de la conscience. Mais la présence de ces sensations n’entraîne pas l’absence d’un état de conscience corrélatif à l’effort cérébral, lequel se fait sentir comme volition, impulsion, attention, etc., non comme « sensation périphérique ». Plus la résistance du fardeau soulevé est intense et produit des sensations intenses, plus la réaction cérébrale est elle-même intense ; mais ce n’est pas comme sensation de la peau de la tête, du côté mû, ce n’est pas comme contraction des muscles de la face, comme mouvement des sourcils, comme grincement de dents qu’une réaction cérébrale peut se faire remarquer de notre conscience, c’est comme intensité de vouloir, de désir, d’attention. Münsterberg confond les effets avec la cause, et des effets très lointains, des chocs en retour.

« Nos idées de mouvement, continue-t-il[1], sont toutes des idées faibles, ressemblant sous ce rapport aux copies de la sensation

  1. Die Willenshandlung, 72, 82. 87, 88.