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p. paulhan. — la responsabilité

de la conversation amène un blâme d’une de ses manières d’être, quelqu’un dire : « elle est bien un peu brusque, ou menteuse, ou grossière, ou envieuse, mais il ne faut pas lui en vouloir pour cela, c’est son caractère. » Il est facile évidemment de répondre : c’est précisément parce que c’est son caractère que je lui en veux. En effet, une personne est responsable d’elle-même, de ce qu’elle est, mais nous reviendrons là-dessus. En ce sens, le mot est une ineptie, mais il peut aussi signifier que la personne à qui l’on reproche une manière d’être, a cette manière d’être, il est vrai, mais que c’est simplement un défaut juxtaposé pour ainsi dire à sa personnalité, qui ne la pénètre pas, qui lui reste en quelque sorte extérieur, qui ne diminue en rien ses autres qualités, un défaut isolé, local, qui ne l’empêche pas d’avoir sur d’autres points des qualités opposées à ce défaut même, une réalité en soi, sans doute, mais une pure apparence ou peu s’en faut par rapport à l’ensemble du caractère. En ce cas, le mot est simplement une vérité confusément sentie et mal exprimée.

Pas plus en morale qu’en psychologie il ne faut exagérer l’indépendance de l’activité indépendante des éléments psychiques. En fait ces éléments restent toujours à quelque degré solidaires les uns des autres, ils sont rattachés à un même corps, nourris par le même sang qui est retiré des mêmes aliments, oxygéné par le même poumon, envoyé par le même cœur. Il est vrai que des différences locales de nutrition et d’irrigation peuvent produire des différences dans le mode de fonctionnement des différentes parties du cerveau. Malgré tout, les différentes parties de l’esprit ne cessent pas complètement d’être solidaires, chacun de nous est bien plus ou moins une personne, et nous en tiendrons compte en résumant ce chapitre dans cette loi :

La responsabilité des éléments psychiques est en raison inverse de la responsabilité de l’ensemble, elle est inversement proportionnelle à la solidarité de chacun des éléments avec l’ensemble des autres.

III. — La responsabilité dans les états morbides et anormaux.

La responsabilité dans les états pathologiques, folie, idiotie, démence, paralysie générale, est une question toujours agitée et non résolue. Nous la traiterons en nous plaçant au même point de vue, que pour les discussions précédentes. La loi qui établit le degré de responsabilité dans les états pathologiques ou anormaux nous appa-