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l’acte. C’est qu’il y a un lien logique moins étroit entre le moi considéré comme un tout et la tendance qui a déterminé l’acte, mais il y a aussi une opposition logique moins forte entre les suites de l’acte et les états du moi qui ont précédé l’acte. C’est encore ici, on le voit, une question de finalité.

Si nous supposons maintenant un fait où il y ait un rapport étroit de finalité entre la tendance et l’acte sans qu’il y ait systématisation étroite entre cette tendance et les autres tendances du moi, nous trouvons une autre forme de la responsabilité. Tel est le cas, par exemple, d’un homme qui, préoccupé, distrait, se laisse aller à commettre, presque machinalement, un acte en désaccord avec son caractère habituel et ses principes. Ici la responsabilité du moi est atténuée à cause du désaccord logique qui existe entre l’acte et le moi ; en revanche la tendance qui a agi peut être considérée comme responsable de l’acte et dans le jugement que nous porterons nous devrons en tenir compte. Nous dirons par exemple qu’un homme est poli, bien élevé, mais que cependant il a un certain fonds de grossièreté qui se montre, s’il ne se surveille pas suffisamment. Selon la force de cette tendance qui est généralement arrêtée, selon la facilité avec laquelle elle se remet en activité, selon la difficulté, la persistance de l’arrêt, notre jugement variera. Nous retrouverons tout à l’heure cette question de la responsabilité partielle. Bornons-nous à retenir que, ici encore, la responsabilité du moi, en tant qu’ensemble de tendances systématisées, est mesurée par le degré de cohérence de l’acte et de ces tendances, par le degré de systématisation psychique. ·

Revenons à notre premier exemple, et supposons à présent la coordination complète entre le moi et la tendance active, entre cette tendance, l’acte et ses conséquences. Supposons qu’au lieu d’une blessure ou d’une mort accidentelle, il y ait eu blessure ou mort intentionnelle, cela revient à supposer une harmonie complète entre les sentiments de l’auteur de l’acte, ses impressions, ses idées, son acte et les conséquences mêmes de son acte. En ce cas, la responsabilité est à son maximum.

De tout ce qui précède nous pouvons tirer cette loi :

La responsabilité du moi est proportionnelle au degré de systématisation des éléments du moi, l’acte et la tendance qui le déterminent devant d’ailleurs être considérés comme faisant partie de ces éléments, proportionnelle aussi au degré de systématisation entre les éléments actuels du moi et ceux qui viennent s’adjoindre plus tard à eux, par le fait même de l’acte, les impressions, les perceptions, les