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d’attention » dans le lobe frontal. Son plus récent exposé de la question est le suivant. Parlant des effets produits par l’ablation du lobe frontal, il dit[1] : « J’ai aussi observé (et mes observations sont confirmées par Hitzig et Goltz) une bien remarquable défectuosité psychique — défectuosité que j’ai essayé de solidariser avec l’incapacité de diriger ses yeux et de regarder les objets qui ne tombent pas spontanément dans le champ de la vision. C’est là une forme d’affaiblissement mental qui me paraît subordonnée à la perte de la faculté d’attention, et j’incline à croire que le pouvoir d’attention est en relation intime avec les mouvements volitionnels de la tête et des yeux. » Ferrier exprime encore ailleurs cette opinion dans les termes suivants[2] : « La faculté d’attention, avec tout ce qui s’y rattache dans la sphère des opérations intellectuelles, doit être en relation intime avec les centres de la perception visuelle et de l’idéation. »

Aucun essai de localiser l’attention n’a été tenté par Bain. Il ne donne en fait aucun détail sur l’attention, et décrit seulement la façon dont elle se produit.

Wundt, toutefois, admet l’existence d’un organe distinct pour l’aperception (attention qu’il incline aussi à localiser dans les circonvolutions du lobe frontal[3]. Mais il faut dire que ses théories sur l’aperception, sa localisation, et les modes d’activité cérébrale qui lui sont associés, est de la spéculation et de la fantaisie pure[4]. Il admet l’existence de ce centre d’aperception auquel, dans son idée, toutes les impressions sensorielles sont envoyées en double (par l’intermédiaire du cervelet) et duquel sortiraient toute une série de fibres communiquant avec chacun des centres sensoriels corticaux — en même temps qu’une seconde série se rendant à chacun des prétendus centres moteurs de la couche corticale. Que se passe-t-il

    tractions musculaires. » — Il fait allusion ici aux mouvements de la tête et des yeux et à l’attitude générale du corps pendant les actes d’attention. — Un peu plus loin, il dit encore (loc. cit., p. 66) : « Dans l’exercice du mouvement et dans la sensation, on voit l’influx nerveux passer des centres moteurs supérieurs (comprenant ceux de l’attention) aux centres moteurs inférieurs auxquels ressortit ce processus d’innervation qui intéresse le mouvement impulsif ou émotionnel. » Cependant Sully a depuis reconnu (Brain, 1890, p. 157) que « l’attention ne peut être ramenée tout entière à un phénomène moteur ». Il ajoute : « Le rapport entre les deux est, je le soupçonne, très voisin de celui qui existe entre une émotion et les divers phénomènes sensoriels et moteurs dont elle s’accompagne. » Cette dernière conclusion peut être admise comme correcte. Mais une semblable conclusion n’est certainement pas en harmonie avec le langage tenu précédemment.

  1. Localisations cérébrales, 1890, p. 151.
  2. Fonctions du cerveau, p. 264 de la 2e édit. anglaise (1886).
  3. Wundt, loc. cit., t.  I, p. 245, et fig.  65.
  4. Voir l’article de Bain dans le Mind, 1887, pp. 175-178.