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LE PROBLEME DE LA VIE

(2e article[1].)

V

Le résultat auquel nous ont conduit les considérations exposées dans le précédent article, c’est, on s’en souvient, que l’organisation et la vie paraissant impossibles à comprendre si l’on prétend leur donner comme antécédents et comme conditions d’existence, soit l’action spontanée des forces brutes de la nature, soit cette même action, non plus aveugle et fatale, mais régularisée et coordonnée par une idée organisatrice. Si, comme nous l’avons vu, aucun processus de composition ne peut expliquer l’être vivant, que l’on suppose la nature soumise à la seule loi du mécanisme, ou que l’on y subordonne le mécanisme à la finalité, c’est donc que l’être vivant ne naît point, comme les apparences pourraient le faire croire, au sein d’un monde préexistant dont quelques parties s’uniraient pour le constituer ; et comme, malgré tout, la connexion de son existence avec celle du monde matériel est évidente, il faut admettre que, puisqu’il ne procède pas de ce monde, c’est ce monde qui procède de lui. Mais laissons de côté pour un moment cette dernière considération sur laquelle nous aurons à revenir, et tâchons de bien préciser nos vues sur la nature de l’être vivant lui-même.

Si l’être vivant n’est point composé, quoiqu’il y ait en lui une grande multiplicité d’organes, et même une infinie multiplicité de parties, il faut qu’il soit un. Mais de quel genre d’unité s’agit-il ici ? Car le mot unité est singulièrement équivoque. On peut distinguer d’abord l’unité absolue, comme serait celle d’un pur esprit duquel toute pluralité est exclue ; puis cette unité tout extérieure et factice qui résulte de l’opération de la pensée considérant comme une chose

  1. Voir le numéro précédent.