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à donner une forme précise et systématique à la preuve spéculative de l’existence de Dieu, « la question brûlante du temps présent ». Gutberlet à qui l’ouvrage est adressé, examine, en prenant pour guide saint Thomas qu’il complète avec les données des sciences naturelles : 1o la preuve tirée du mouvement ; 2o la preuve cosmologique ; 3o la preuve tirée du nombre limité des êtres cosmiques ; 4o celle qui porte sur les degrés de l’être ; 5o la preuve de saint Augustin. Nous ne voulons pas soutenir, dit-il, que toutes ces preuves ont une valeur strictement égale ; nous accordons que : quelques-unes d’entres elles, la dernière en particulier, n’ont de force que par leur union avec d’autres ; mais il résulte cependant de l’exposition qui précède qu’il n’est pas inutile d’introduire des divisions dans la preuve de l’existence de Dieu. Au lieu de faire un choix entre la preuve spéculative et les autres preuves considérées dans leur multiplicité, il faut prendre l’une et aussi les autres.

Costa-Rossetti, S. J. La doctrine de la philosophie chrétienne sur l’État. — Article fort important où l’auteur, membre de la Société de Jésus, résume et développe un ouvrage précédemment publié (Philosophia moralis seu Institutiones Ethicæ et Juris naturæ secundum principia Philosophiæ scolasticæ, præsertim S. Thomæ, Suarez et De Lugo methodo scolastica elucubratæ, Innsbruck, 1886) Il y est traité : 1o du but et la nature de la société politique ; 2o de l’origine de la société politique. Dans un second article il est question de la nature, de la tâche et des limites du pouvoir politique, puis de l’origine de ce pouvoir. Il est inexact, dit l’auteur en combattant Rousseau et Hobbes, que la doctrine du droit médiatement divin ait quelque parenté avec celle de Rousseau. C’est altérer la vérité que d’y voir seulement une opinion de Bellarmin et de Suarez ou même d’une certaine partie des scolastiques. Dans un troisième article, l’auteur examine le préjugé capital contre la doctrine chrétienne sur l’origine de la société politique et du pouvoir de l’État. On croyait, dit-il, que cette doctrine s’appuyait essentiellement sur la supposition que le pouvoir politique a toujours à l’origine reposé immédiatement dans tout le peuple, c’està-dire dans l’ensemble de la société politique et que plus tard seulement il a été transporté à une ou à plusieurs personnes déterminées. Mais les grands maîtres de la scolastique ont bien connu les patriarches et ils ont considéré le patriarcat comme une forme politique primitive. Aussi Costa-Rossetti combat les écrivains chrétiens qui, comme Carl Ludwig Haller, ont soutenu l’existence d’un droit divin immédiat pour les rois, parce qu’ils ont montré que jamais l’autorité ne pouvait avoir appartenu au corps politique tout entier. Enfin, dans un quatrième article, Costa Rossetti critique les idées de Haller développées chez certains néo-scolastiques. Puis il résume et conclut. L’État au sens propre du mot est une société et une communauté parfaite dans laquelle vivent ordinairement tous les hommes. C’est