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M. Liégeois lui parle, elle ne lui répond pas ; il essaie de la réveiller, impossible. Une fois cet état bien constaté, je la réveille. Elle n’est pas plutôt réveillée qu’elle se retrouve dans le même état où elle était avant que je l’eusse endormie, c’est-à-dire qu’elle ne me voit plus, qu’elle ne m’entend plus, et qu’elle n’est plus en rapport avec moi que par le toucher, tandis qu’elle entend et voit toutes les personnes présentes. Il faut que M. Liégeois lui enlève la suggestion négative pour qu’elle m’entende et me voie de nouveau.

Le même jour je recommence l’expérience avec Mlle A… E… Je l’endors et lui suggère qu’elle n’entendra ni ne verra M. Liégeois. Bref l’expérience suivit la même marche et eut absolument le même résultat que la première fois. Le lendemain les mêmes expériences sont répétées avec la même réussite devant un certain nombre de personnes. Il faut noter que les passes étaient faites à quelques centimètres de la figure du sujet. Je me contente de mentionner cette expérience sur laquelle j’aurai occasion de revenir plus tard.

Dans ces expériences d’hallucinations négatives, on peut toujours, il est vrai, supposer la simulation. Je ne puis ici discuter cette question de la simulation dont j’ai déjà dit quelques mots plus haut. La iconviction ne peut se faire que quand on étudie les faits par soi-même et non par ouï-dire ; c’est ainsi que la mienne s’est formée et tout ce que je pourrais dire ne modifierait pas évidemment la manière de penser d’un incrédule. Là encore, comme le dit M. Paul Janet, ce sont les circonstances antérieures qui servent de preuves, et ces preuves, il faut les chercher dans les phénomènes physiologiques de l’hypnotisme que je n’ai pas à étudier ici.

(La fin prochainement.)
H. Beaunis.