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secrétan. — la restauration du thomisme

ciellement consacrée aujourd’hui, » peuvent donc être considérés comme l’équivalent de la correction promise. Au nombre des motifs qui ont porté ce grand docteur et toute l’école à prendre le péripatétisme pour base philosophique et pour texte constant, en dépit des divergences les mieux constatées sur plusieurs points capitaux de doctrine, M. Talamo, qui voit bien ce qu’il regarde, place la nécessité de combattre les erreurs qu’on puisait de leur temps à cette source, comme les Pères de l’Église avaient dû s’attacher à Platon pour combattre au dehors le néoplatonisme, ennemi de la foi chrétienne, et pour réfuter au dedans les hérésies issues du même néo-platonisme, qui menaçait l’intégrité de cette foi.

L’an 1269, l’évêque de Paris ajoute à la liste des propositions hérétiques déjà condamnées treize articles, dont la plupart sont évidemment péripatéticiens. Les voici textuellement :

Primus articulus est quod intellectus omnium hominum est unus et idem numero. Secundus est quod ista est falsa vel impropria, homo intelligit. Tertius est quod voluntas hominis ex necessitate vult et eligit. Quartus est quod omnia quæ in inferioribus aguntur, subsunt necessitati corporum cœlestium. Quintus est quod mundus est æternus. Sextus est quod nunquam fuit primus homo. Septimus est quod anima est forma hominis secundum quod homo corrumpitur corrupto corpore. Octavus est quod anima separata post mortem non patitur ab igne corporeo. Nonus est quod liberum arbitrium est potentia passiva, non activa, et quod necessitate movetur ab appetibili. Decimus est quod Deus non cognoscit singularia. Undecimus est quod Deus non cognoscit aliud a se. Duodecimus est quod humani actus non reguntur Providentia divina. Decimus tertius est quod Deus non potest dare immortalitatem vel incorruptionem rei corruptibili vel mortali.

Plus tard, de nouvelles erreurs au nombre de plus de 200 furent condamnées dans le même diocèse. À nous en tenir aux premières, on comprend que les docteurs orthodoxes réfutant tous les points signalés, et proposant sur chacun d’eux une opinion contraire, leur péripatétisme diffère étrangement de celui du Lycée. La force des choses semblerait le réduire à la logique formelle et à la terminologie, car sur les questions les plus générales, sur la définition des catégories essentielles du système, par exemple celles de la forme et de la matière, chaque docteur a ses vues propres, qui naturellement commandent tout. Dans les questions considérées comme purement philosophiques et sans influence sur la foi, ces penseurs diffèrent singulièrement les uns des autres, non moins que de l’auteur auquel ils se sont attachés en commun.