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pour vaincre les primitives et grossières illusions qui sont parvenues jusqu’à nous, se transformant en entités et en idéaux. Il a compris à merveille les liens intimes qui rattachent aux variétés organiques celles des sens et de l’intelligence, et prouvé l’hérédité des uns par l’hérédité des autres ; il a assimilé les aptitudes spéciales des sens et de l’intelligence aux modes successifs et multiple des organismes ; il a montré, enfin, mieux que personne, que les uns et les autres évoluent d’un fait biologique élémentaire. Il a donc véritablement détruit, relativement aux faits les plus compliqués de la biologie et de l’esprit, ce qui est tout un, les plus vieilles et les plus triomphantes illusions.

G. Cattaneo : Les formes fondamentales de l’organisme (3e  et dernier article) : Origine de la symétrie bilatérale.

Pucca : Le sentiment et l’impulsion motrice.

Regalia : La conception mécanique de la vie (selon Spencer). Cet article se rattache à celui qui a été analysé plus haut sur la téléologie de la douleur.

E. Ferri : Le cannibalisme dans les races humaines. Né du besoin de nutrition, spécialement dans les îles, consacré ensuite par les religions, excité par la fureur guerrière et conservé héréditairement par pure et horrible gloutonnerie, le cannibalisme est, de toute façon, le dernier degré de la férocité humaine. Il accompagne très souvent l’homicide, et en revêt les divers aspects, plus ou moins rebutants, enlevant même par là toute différence essentielle entre l’homme et la brute. Les preuves anthropologiques et historiques abondent pour montrer qu’il n’y a pas une seule race humaine, un seul peuple considérable, un groupe géographique important de l’humanité, qui n’ait pratiqué l’anthropophagie et les sacrifices humains. L’éminent auteur étudie l’évolution naturelle de cette odieuse forme d’homicide : le cannibalisme par besoin, par religion, par préjugé, par piété filiale, par fureur guerrière, par gloutonnerie, enfin le cannibalisme juridique, dont la symbolique hostie est la dernière et inconsciente expression.

Revue analytique : Philosophie der Wissenschaften, de E. Schultze (K. Fricke.)

Spencer. — Coup d’œil sur le passé et l’avenir de la religion.

E. Morselli. — Réflexions sur l’article précédent. Spencer prétend assimiler en quelque façon l’absolu selon la religion à l’absolu selon la science, la vénération de l’homme religieux à l’admiration du savant. Or, l’absolu selon la science est intellectuel, non sentimental ; il est relatif, l’inconnaissable n’est tel que pour nos moyens actuels de connaître. L’inconnu de la science n’est rien en dehors des réalités ; il n’a pas une existence en dehors et au delà des phénomènes. Enfin, l’homme religieux vénère par ignorance, et en raison de son ignorance ; l’homme de science admire en vertu de ce qu’il sait, mais il admire de moins en moins en proportion de ce qu’il sait. Quelle conciliation espérer entre la science et la religion ou la métaphysique, qui sont fondées sur la prétendue existence de l’Absolu, de l’inconnaissable ?