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CROYANCE ET VOLONTÉ


Les diverses questions philosophiques ne sont pas seulement diversement résolues dans les systèmes différents, elles sont aussi différemment posées et elles prennent dans chaque système une manière d’être particulière déterminée par l’ensemble et la coordination des autres parties du système. On peut comparer à ce fait les résultats de l’anatomie comparée. Les parties du corps qui se correspondent varient dans les différents groupes, l’aile de l’oiseau correspond au bras de l’homme et à la patte du mammifère. De même, pour s’adapter à des conditions différentes, les questions correspondantes varient d’un système à l’autre. La question de la finalité n’est ni posée, ni résolue de même dans la philosophie spiritualiste, dans la philosophie kantienne, dans la philosophie positive, dans la philosophie évolutionniste. Comparez également les vues sur la vie future dans le spiritualisme classique, le panthéisme, le criticisme phénoméniste, le positivisme de Comte. Certains systèmes établissent des transitions entre les plus opposés, mais ceux-ci diffèrent d’une manière frappante. Entre la conception spiritualiste de l’âme, substance indestructible par essence et garantissant la survivance de la personnalité et la conception positiviste de l’immortalité subjective et de l’incorporation au Grand être, il y a un abîme.

Il me semble intéressant et utile de voir ce que deviennent avec certaines conceptions du monde des idées, des théories inspirées par des conceptions différentes et je voudrais examiner, ici, avec un système et dans un esprit différent, la question des rapports de la volonté et de la croyance qui a été surtout étudiée par l’école criticiste et dont M. Brochard s’est récemment occupé dans un intéressant article de la Revue Philosophique[1]. On verra que nous arriverons sur bien des points à des conclusions analogues aux conclusions de M. Brochard et du criticisme, mais nous rejetterons aussi ces conclusions sur plusieurs points et l’interprétation philosophique des faits sera, en tout cas, bien différente.

  1. Voir le numéro de Juillet dernier.