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Entendu comme vertu de la volonté, il est, la force la plus précieuse dans l’homme, et la plus haute énergie dans l’univers. Au milieu de ce que Lindner appelle les trois facteurs aveugles de l’éducation, la nature, le destin et la société, le caractère moral, impliquant la personnalité, la liberté, la raison, est une force qui se fait, non pas nécessairement, mais par elle-même. D’où la nécessité de l’autodidaxie dans l’enseignement de la morale et dans l’éducation de la volonté. La cause efficiente, comme disait Leibnitz, se confond donc ici avec la cause finale. L’éducation à pour but le développement de la personnalité morale, par elle-même,

III. — On pourrait, c’est l’auteur qui en fait la remarque, croire épuisé l’objet de la pédagogie théorique. Mais il estime que le passage à la pédagogie appliquée ne serait pas possible, si l’on n’avait au préalable éclairé quelques questions touchant la manière générale dont les principes doivent être appliqués. Il étudie, par conséquent, dans les deux derniers chapitres, « si, et comment l’école peut être, en général, une fonction sociale ; quels rapports, à cet égard, existent entre l’État, la famille et les diverses associations ; quelle influence peut exercer l’action éducative sur la pathologie sociale et dans le fait de la criminalité (ce qui sera plus particulièrement étudié en pédagogie appliquée) ; quels rapports existent, et de quelle valeur, entre l’éducation physique, l’éducation intellectuelle et l’éducation morale ; en quoi l’on doit faire consister l’idéal de l’art pédagogique, et autres recherches semblables, d’ordre théorique. » M. Siciliani entre sur tous ces points, de théorie ou d’application, comme l’on voudra, dans des observations précises, intéressantes, souvent neuves.

Les quelques critiques que je dois faire à ce livre atteignent non moins la forme (je ne dis pas le style, assurément) que le fond. La partie préparatoire me semble un peu surchargée, et faire double emploi avec certains chapitres de la Psychogénie et de l’Histoire pédagogique. Mais ce défaut sera peut-être un mérite aux yeux des lecteurs novices en fait de philosophie scientifique et de ceux qui n’auront pas lu l’Histoire de M. Siciliani. On a contesté, on contestera encore, malgré les rapports intimes de la théorie avec l’histoire et avec l’application, que ce soient là trois parties distinctes d’un tout scientifique. La science de l’éducation ayant essentiellement une fin pratique, il ne paraît pas démontré que la théorie puisse être logiquement distincte des applications générales. Mais y a-t-il bonnement lieu de clore le débat, avant d’avoir en main toutes les pièces du procès ? Quand M. Siciliani aura publié sa Pédagogie appliquée, on pourra se prononcer en connaissance de cause. M. Siciliani paraît, en outre, quelque peu dur, je ne dis

    ce petit volume, consacré à l’éducation morale et à l’éducation féminine, des discussions très utiles sur les rapports de la morale avec le climat, l’hérédité, l’instruction populaire, et sur la distinction à faire entre l’éducation de l’intelligence et celle du sentiment. On sait l’importance qui s’attache à ce dernier objet, dont les moralistes, les pédagogues et les hommes d’État doivent s’occuper de concert.