Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 18.djvu/569

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
565
revue générale. — b. perez. Les théories de l’éducation.

pour ces doctrines, est en dehors du sujet, sociale, politique, industrielle. L’optimisme de l’éducateur se changerait ici véritablement en dogmatisme et en despotisme pédagogique : il aboutirait à faire contracter des habitudes.

Il existe, entre ces deux doctrines excessives, une théorie intermédiaire, qui prend une part de vérité dans le substantialisme absolu et le phénominisme absolu compliqué de l’évolutionnisme mécanique : c’est l’évolutionnisme critique, autrement dit la philosophie scientifique. Sa note dominante est la relativité, mais l’affirmation de l’in-se, de quelque chose d’indépendant, d’un je ne sais quoi d’inconnaissable, que le sujet ne connaît pas, mais qu’il pense. Une telle doctrine suffit pour sauver l’esprit de la ruine des métaphysiques extrêmes. C’est dans l’évolutionnisme critique qu’il faut chercher les bases solides de la pédagogie scientifique. La loi d’évolution, bien comprise est, comme l’a dit Schäffle, « une grandiose pédagogie ».

Les deux sciences mères qui donnent un fondement immédiat à la science de l’éducation, sont la biologie et la sociologie : l’une engendrant la morphologie et la psychogénie, l’autre la morale et le droit. La morphologie et la psychogénie nous montrent un parallélisme continu entre le développement des formes de l’être vivant et le développement de ses facultés psychiques. La morphologie nous fait assister à la formation des divers types organiques. Elle nous fait voir comment l’individualité organique s’achève. Elle nous montre que la nature travaille sans cesse à la création de l’individu. L’individu parfait n’est qu’un système d’individus, à divers degrés de développement, mais entièrement subordonnées au tout, La tendance à l’unification des parties associées et subordonnées est évidente dans l’organisme. Mais l’unité est possible seulement dans le domaine de la psychologie. À la formation naturelle de l’individu morphologique correspond la genèse naturelle de l’individu psychologique, aux types supérieurs de l’organisme les grands genres psychologiques. La psychologie comparée nous apprend la formation successive de l’individualité psychique. Celle-ci n’est elle-même qu’un système d’âmes plus ou moins indépendantes entre elles, Il ne faut pas confondre l’unicité psychique, conception traditionnelle que détruit l’hypothèse du polypsychisme, avec l’unité de conscience, qui résiste à cette hypothèse. Le centre supérieur, le centre de rapport, comme disait Lamarck, n’est pas une conscience unique, mais il est une conscience une. La conscience s’étend à toutes les facultés de la vie mentale. Dans l’homme, qui reproduit psychologiquement toute la série animale, s’ajoute quelque chose de nouveau, c’est le développement de la conscience, qui inaugure le régime de l’auto-conscience.

La psychologie juridique et la psychologie morale montrent la morale sociale, non plus telle qu’elle est, mais telle qu’elle doit-être. M. Siciliani distingue, à la lumière des travaux récemment publiés sur cet intéressant sujet, le caractère des unions organiques et celui des unions sociales. Dans les premières, autonomie et solidarité des parties subor-