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ments très vagues ; mais la psychologie nous montre comme certain que lorsqu’une sensation contredit une représentation, le premier état de conscience chasse et supprime le second.

Le succès d’une rectification dépend de plusieurs conditions. On peut classer les illusions en trois groupes suivant que la réduction de la sensation par la représentation mentale est complète, partielle ou nulle : 1o Illusions qui une fois détruites ne parviennent pas à se recomposer (cas des illusions appelées actives par M. J. Sully, c’est-à-dire qui sont dues à un relâchement de l’attention ; 2o illusions, qui, quoique rectifiées peuvent renaître, quand on s’y prête en faisant un effort d’imagination : l’expérience dite d’Aristote : les illusions des amputés) ; 3o illusions qui persistent à s’imposer après que l’esprit en à pénétré la cause (illusions passives de J. Sully ; courbure apparente du bâton plongé dans l’eau, etc).

Les faits précédents traduisent sous une forme expérimentale le principe de contradiction qui pourrait, dans le langage de la psychologie moderne et pour le sujet qui nous occupe, s’appeler le principe d’antagonisme des états de conscience. Pour conclure, toute opération de l’esprit a pour but l’action. Sous ses formes les plus simples, elle est toujours bien adaptée pour agir. À mesure qu’elle se complique, les chances de non-adaptation (d’erreur) augmentent : de là la nécessité d’une fonction rectificatrice. Aussi tous les moyens que possède l’esprit de corriger les illusions sont des appareils de perfectionnement, les derniers qui apparaissent dans le développement phylogénique comme dans le développement ontogénique.

Edgeworth. La philosophie des chances. Étude critique à propos du livre de M. Venn : « Logic of Chance »,

Th. Whittaker}}. Giordano Bruno : Étude biographique et exposition critique de sa philosophie. Bruno a toujours été préoccupé de l’utilité de la science et de l’instruction : il distinguait entre la science qui est « instrumentale » et celle qui conduit par elle-même à la perfection de l’esprit. L’auteur annonce la publication prochaine d’un volume « The life and Works of G. Bruno, » chez Trübner à Londres.

Discussions. Sur la classification des sciences, par H. M. Stanley. L’auteur passe en revue diverses classifications données dans les temps modernes, en insistant surtout sur celle de Spencer. — Revenir à Kant (Going back to Kant), par G. Stokes. C’est la formule à la mode et qu’on répète sur tous les tons en Allemagne, en considérant l’œuvre de ses successeurs Fichte, Schelling et Hegel, comme non avenue, sinon extravagante. Il serait pourtant bon d’étudier ces trois derniers, non pour accepter le résultat final de leurs philosophies, mais pour mieux comprendre ce qui est impliqué dans la méthode employée par Kant, pour répondre à cette question : Comment les jugements synthétiques à priori sont-ils possibles ? — La doctrine de l’absolu et l’empirisme, par W. James. Critique de l’article de Haldane dont nous avons rendu compte (février dernier, p. 237). La grande critique que l’empirisme adressera toujours à la doctrine adverse, c’est que celle-ci, dans sa construction