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G. POUCHET. — la biologie aristotélique

La ressemblance du style prouve ici peu de chose, surtout alors que celui d’Aristote ne passe point en général pour châtié. Les règles qui sont de mise quand on veut établir l’identité d’une œuvre d’imagination, ne suffisent plus pour les livres de science. Il y faut encore l’unité de vues, l’unité dans cet autre style qui règle le fond des choses. La statue peut avoir été taillée tout entière dans le même bloc et avec le même outil, vous saurez toujours démêler ce qui appartient au maître, des retouches maladroites de l’élève qui a oublié ses leçons. À côté de l’étude analytique du texte, qui appartient aux grammairiens, on peut en imaginer une autre portant sur le sujet et la manière dont il est traité. Autre chose est de s’approprier la façon d’écrire d’un naturaliste, autre chose est d’entrer dans sa doctrine, de se conformer à sa méthode, à ses façons d’observer ou de raisonner et de ne pas tomber dans des erreurs que son grand savoir pouvait seul éviter. On reconnaît ainsi dans la collection aristotélique une foule d’interpolations à des signes pour ainsi dire certains. Il y aurait là sans doute une intéressante étude à faire et des plus dignes d’attacher quelqu’érudit à la fois profondément versé dans l’histoire des sciences de la vie, dans la langue et l’esprit grecs.

Si vives que soient des impressions de lecture, nous ne prétendons nullement — on le comprendra — les donner pour des arguments de discussion. Mais il est impossible de n’en pas tenir compte devant la différence profonde qui existe entre le commencement et la fin — celle-ci toujours inférieure — de la plupart des traités aristotéliques, par exemple ceux De l’âme, De la jeunesse, Du ciel. Un d’eux cependant, et le plus important pour la biologie, semble avoir moins souffert que les autres, le traité Des Parties. C’est par lui qu’il convient de commencer la lecture de tout ce qui a trait aux sciences de la vie dans la collection. C’est là évidemment que le chef de l’école a laissé la plus forte empreinte de son génie scientifique. Viennent ensuite le traité De la Genèse, puis plusieurs des opuscules que nous avons signalés, et avec eux le IVe livre de la Météorologie tout à fait remarquable et singulièrement placé à la fin de cet ouvrage ; enfin presque en dernier rang l’Histoire des animaux, sauf le début jusqu’au milieu du livre IV, qui est certainement d’Aristote ou du moins inspiré de lui.

L’Histoire des animaux, si différente qu’elle ait été sans doute à l’origine, de la forme que nous lui connaissons, pouvait servir de cadre — et ce fut là sa fortune — à tous les contes sur les bêtes plus ou moins fabuleuses dont l’esprit humain aime à peupler les pays lointains, à toutes les erreurs répandues même sur celles qui vivent près de nous. Aussi Pline faisait-il déjà des emprunts aux