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G. POUCHET. — la biologie aristotélique

naîtrions pas Leophanes ; pourtant c’est encore lui qui a raison, prétendant que les testicules ont une part directe dans le fonctionnement des organes génitaux mâles, tandis qu’Aristote leur dénie ce rôle (voy. ci-dessous).

L’Histoire des animaux traite avec assez de détails du Chien et du Cheval ; qui donc se douterait, si l’œuvre de Xénophon n’était pas parvenue jusqu’à nous, qu’il existait dans les bibliothèques d’alors deux ouvrages importants sur l’art du cavalier et de la chasse, auxquels ceux qu’on écrit de nos jours n’ajoutent pas beaucoup ? Il est hors de doute qu’une quantité de livres touchant de près ou de loin à la mathématique, la physique, la biologie et aux applications de ces sciences, devaient être entre toutes les mains au temps d’Aristote, lus, copiés, commentés dans les écoles. Quelqu’universalité qu’on prête au génie du stagyrite, il ne faut pas perdre de vue qu’il a vécu au milieu d’un monde déjà savant et qu’en définitive les documents certains nous manquent pour établir la juste part qu’il convient de lui attribuer à l’avancement des connaissances humaines.

La critique moderne a fait justice de cette légende rapportée par Strabon, des manuscrits d’Aristote enfouis pendant près de deux siècles, puis retrouvés à moitié moisis, mangés des vers, et finalement reconstitués tant bien que mal par Apellicon. On admet aujourd’hui que les livres d’Aristote n’ont jamais cessé d’être en usage dans les écoles péripatéticiennes jusqu’au jour où Sylla — et ce n’est pas le moindre titre à la gloire de ce grand homme — les donna au monde dans la forme où nous les avons encore aujourd’hui. Celle-ci malheureusement traduit d’une manière bien imparfaite la pensée originale du maître. On n’en saurait douter. Qu’Aristote ait été ou non l’auteur ou seulement l’inspirateur des divers traités qui portent son nom, presque aucun, semble-t-il, n’est arrivé à Rome et ne nous est parvenu dans son intégrité primitive.

On admet d’abord qu’Aristote n’a point achevé ses livres. Cela est possible, probable même, en raison de la variété des sujets qu’il a abordés et des traverses de la fin de sa vie. Mais combien voudrait mieux pour nous, au lieu de tout ce fatras reconstitué, d’avoir les notes informes du maître ou simplement ses leçons recueillies par des élèves, dans leur rédaction première. Cela du moins aurait toute la valeur des cartons laissés par l’artiste pour une grande page de peinture interrompue. Le mal est dans les restaurations, les arrangements nouveaux, que la main qui les fait soit habile ou maladroite. Les fautes de copistes ont bien leur importance ; il est certain que déjà dans les manuscrits apportés à Rome elles devaient être nombreuses. Et dans les traités scientifiques elles ont une gravité parti-